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«Pawol Kreyol»

L’essai «la Prison vue de l’intérieur» (2007 – éd. ALBIN MICHEL)
Un essai d’Expressions professionnelles:
«se méfier des évidences» (p. 10)

par Véronique LAROSE

la Prison vue de l’intérieur
La Prison vue de l’intérieur • 2007 • Albin Michel
ISBN 978-2226175960 • 19 €

Voici un essai d’utilité sociale: la détention est dite par ses professionnels. L’authenticité de leur voix? un vécu humain quotidien. Ces anecdotes ne portent pas du tout le sceau d’une surenchère malsaine, voyeuriste. Non, il s’agit là d’une tentative:

«La prison est invisible. […] Et c’est sans doute là le surprenant mérite de cet ouvrage: il signale cet invisible» (Patrick CHAMOISEAU, en préface: p. 7, p. 9)

Un collectif de voix: ces professionnels de la Pénitentiaire française, au-delà des murs, ont choisi de présenter simplement, sainement leur univers. Dès lors, cet essai a «le surprenant mérite» de «signal[er] cet invisible» (Patrick CHAMOISEAU, en préface p .9). Une déclinaison de métiers humanise cet espace: personnels de surveillance, personnels d’insertion et de probation, personnels médicaux, psychologues, enseignants, etc. Autant d’interlocuteurs impliqués. Ces témoignages contextualisent ce temps différent, ce temps de la détention.

Expliciter la détention : cet essai a également un rôle didactique. Pour définir la catégorisation des publics détenus, leur rythme carcéral, leur quotidien matériel et sanitaire, les issues culturelles, sportives et re-socialisantes. Découvrir la Pénitentiaire à travers ses histoires et son Histoire participe à cette volonté d’ancrage de l’ouvrage : un ancrage dans le réaliste.

Le chapitrage : en sept sections, cet essai choisit, en vécus mêlés, de donner une Expression à la détention. Ces thématiques, fouillées et illustrées, permettent une pluri-disciplinarité:

  • Préface de Patrick CHAMOISEAU
  • Prologue de Claude d’HARCOURT
  • PARTIE I – Derrière les murs
  • PARTIE II – Plus de 80 000 entrants par an
  • PARTIE III – La sécurité
  • PARTIE IV – La vie quotidienne en détention
  • PARTIE V – Vers la sortie
  • PARTIE VI – Etre un «pénitentiaire» aujourd’hui
  • PARTIE VII – Histoire
  • Lexique en annexe
  • Remerciements

La préface Patrick CHAMOISEAU: il intervient en qualité de professionnel – il est Conseiller d'insertion et de probation – et en qualité d’auteur. Par ses deux statuts, il se fait donc Passeur de Paroles. En quatre pages, denses de sens, Patrick CHAMOISEAU (d)écrit la détention en espace «invisible», «effacé» (p.7). Cette préface est une introduction personnelle et émotionnelle et professionnelle. Le cadre pénitentiaire, confie-t-il, l’a intrigué très jeune: «lorsque enfant, j’interrogeais l’immense porte du centre pénitentiaire de Fort-de-France» (p.7).

Le temps de la détention est autre, il est différent: «bien plus qu’une mise en parenthèse: une mise à l’écart des tissus du réel. La société dissimule là ses plaies» (p.7) L’attachement de Patrick CHAMOISEAU à cette détention est palpable : « la poésie secrète d’une curieuse entité» - «le lieu des contraires» (p.9). Il apprécie la portée collective de cet ouvrage: y sont réunis des ressentis de professionnels investis: «se rassembler pour associer nos vérités» (p.10). Un véritable défi.

Il a la sagesse de pourtant prôner cette humilité: «se méfier des évidences» (p. 10) - «voyez comme nous ne savons rien d’elle [la prison] tout en découvrant tout […] Voyez comme la prison nous étonne encore» (p.10). Ce cadre pénitentiaire conserve donc TOUT son mystère d’atmosphère: «mille fois la désigner sans jamais pour autant la nommer» (p.10)

L’auteur se positionne alors dans ses choix thématiques: son écriture n’a pas pu «nommer» cet espace si particulier – «je n’ai jamais écrit sur la prison car la prison ne s’est jamais ouverte à moi» (p.8). En 1994, il a pourtant essayé de dire le Bagne de Guyane dans l’ouvrage «GUYANE, TRACES-MÉMOIRES DU BAGNE» (Photographies de R. HAMMADI). Il souhaite ériger en «patrimoine de l'humanité» le Bagne de Guyane: «nos monuments demeurent comme des douleurs. Ils témoignent de douleurs. Ils conservent des douleurs. Mais la mémoire des hommes qui étaient passés là, qui avaient souffert là, s'est mystérieusement maintenue.»

Véronique Larose – mars 2007

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Pawol Kreyol

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