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VOYAGE À TRAVERS LES CHANTS

La chorale Joie de Chanter nous a présenté «NOS AMERIQUES»

Jude Duranty

Chanter

La chorale Joie de Chanter pour se rendre à «Nos Amériques» a choisi un mexicain par le chapeau, Jacques Catayée. Par sa direction chironomique, comme à l’accoutumée depuis plus de 40 ans au départ de la fondatrice Paulette Nardal, il a mené la chorale et le public à bon port.

Femme de Lettres, membre actif du mouvement de la Négritude auprès d’Aimé Césaire, elle réunissait un groupe de jeunes en 1954 pour former cette chorale Joie de Chanter. Le professeur d’anglais de l’époque a tout naturellement initié ces jeunes garçons et filles au Négro spirituals. Paulette Nardal a très vite compris que la dimension créole était fondamentale et qu’il fallait écrire et composer sur le pays. L’une de ses nombreuses œuvres la berceuse Ti manmay racontant la mort d’un enfant dans un accident de la circulation, reste une anthologie et témoigne de cette volonté de s’ancrer dans la réalité créole.

La chorale «Joie de Chanter» qui s’est constituée en association en 1972 a déjà entrepris de nombreux voyages tant en Europe que dans les Amérique. C’est précisément ces voyages qui sont à l’origine de ce riche répertoire glané au gré des rencontres. Ces déplacements ont permis à la chorale de fréquenter et d’apprécier la richesse de ce patrimoine musical choral très présent dans ces pays. Ces pays de culture vocale ont développé cet art avec une grande maîtrise par le biais de leurs formateurs, compositeur et arrangeurs hors pairs. Citons par exemple Nestor Zadof au Mexique, Electo Silva à Cuba, Alberto Grau au Vénézuéla ou Michel Eustache Haïti-Vénézuéla… Le chant choral n’est pas un art mineur et cette musique reste largement diffusée sur les ondes contrairement à notre pays.

L’ancien président de la chorale «Joie de chanter», Daniel Compère lors des remerciements, n’a d’ailleurs pas manqué de pointer du doigt cette absence quasi-permanente, sauf sur Radio APAL, la seule qui diffuse la musique chorale.

La chorale Joie de Chanter a présenté son spectacle en deux parties:

La première invitait le public nombreux à pérégriner dans «Nos Amériques».

Soulignons l’excellent travail des techniciens du CMAC/Atrium qui ont installé des micros en conséquence permettant à la soixantaine de choristes environ d’évoluer en toute liberté. Ce qui a permis des changements de postures (presque à chaque titre) cassant avec la sacro-sainte posture d’un chœur figé à l’européenne avec en plus des partitions en mains. Cet esprit latin, utilisé beaucoup d’ailleurs par les chorales d’Amérique latine, Argentine, Vénézuéla, nous a proposé un autre visage du chant choral où le corps prend toute sa dimension et n’est pas «bridé» ou engoncé dans un costume sombre.

Du Vénézuéla à Trinidad en passant par le Brésil avec le drame des indiens; l’Argentine, Aruba avec cette belle œuvre en papiamiento E Mariposa qui a ravi le public.

Bien accompagné par l’orchestre composé de cordes deux violons (Valérie Beaupied, Mano Cesaire) un violoncelle Lara Slabiak, un percussionniste, Joseph Shin-Oua-Siron, Micheline Boclé aux claves, à la batterie Albert Likao-Galilée, Charles Mesdouze accroché comme une ventouse cette fois à la basse, et Rose Marie Sarotte au piano d’une efficace sobriété.

Le public avait donc droit à un visuel magnifique servi par un décor sobre (sans fanfreluche) qui a fait mouche. Les diapositives projetées contribuaient à nous «télé porter» dans les pays respectifs présentés par leur drapeaux ainsi que de fabuleuses images d’un lieu. Ce voyage à travers les costumes des choristes, du plus somptueux au plus modeste; était vraiment de nature à nous dépayser pour écouter et surtout entendre, toute la richesse de la musique chorale sud américaine. Cette incursion a omis les États-unis, trop souvent mis en exergue au détriment de ces pays d’une richesse chorale insoupçonnée.

À l’issue d’un entracte bien mérité, car les chants se sont enchaînés non stop depuis 20h00 précises à 21h15 la chorale nous revenait en redevenant par le costume et par les chants, complètement martiniquaise.

Une seconde partie complètement ancrée dans la terre martiniquaise

Elle a débuté par cette affirmation «Martinik two bel» de Gaston Nuissier pour faire une large place aux compositeurs tels que Fernand Donatien (Glicéria, A sipozé) Mano Césaire (Sinèlo, Ralé senn la) et bien d’autres titres comme Machann bonbon et ce beau texte de Micheline Boclé harmonisé par Fernand Donatien nous rappelant le phénomène des yoles avec: Mi sé yolè a rivé. Biguine, mazurka, valse, rumba et boléro était au programme de cette seconde intervention pour rappeler l’existence de ces beaux rythmes quelque peu abandonnés pour d’autres pas toujours meilleurs.

Avant son départ à Vaison-La-Romaine, incontestablement la chorale «Joie de Chanter» à l’issue de longs mois de travail nous a produit un spectacle de qualité que nous souhaiterions voir en télévision.

La musique martiniquaise est aussi exprimée par le chant choral trop souvent zappé voire ignoré quand il n’est pas réduit à une expression uniquement dans les églises. Cette chorale qui par le passé a organisé les «Semaine chantante» ou les «Choralies de Ducos» a fait des émules. Dans ce même esprit, la chorale «L’Orchidée de Schœlcher» a organisé les différentes éditions de «Découverte du chant choral Martiniquais» à l’espace Osenat.

Plus que jamais, cet art choral mériterait un autre traitement médiatique, artistique pour apaiser peut-être les tensions actuelles. Ne dit-on pas que la musique adoucit les mœurs?

Assurément, la chorale «Joie de Chanter» y a contribué mardi 8 juin 2010 à l’Atrium.

An bel mèsi, épi lajwa pou chanté                                                

    Jid

boule

 Viré monté