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Pourquoi les temps présents disent non
à tout projet de toucher à la constitution de 1987

Luc Rémy

Malgré les nombreux accidents dont elle a été victime, la constitution de 1987 s’est révélée un frein remarquable contre maintes ambitions politiques déréglées.

La constitution de 1987 a bien tenu la route dans sa phase probatoire: elle a survécu aux pires tentatives (mise en veilleuse de certains articles, coups d’état, destruction de l’armée etc., manœuvres pour la réviser à la hâte…); elle est toujours dans sa phase probatoire car la plupart de nos dirigeants, de 1987 à aujourd’hui, se sont montrés hostiles à son application et se sont amusés à la violer.

La constitution de 1987, constitution programme, est porteuse d’un projet démocratique sans précédent consigné à la faveur des revendications de 1986 et du consensus quasi national de l’époque, consensus national qui n’existe pas aujourd’hui pour révoquer ce projet.

Une mentalité d’attachement à la constitution de 1987 s’est considérablement développée dans le pays; elle commence ainsi à s’institutionnaliser, à s’intégrer dans la culture politique démocratique haïtienne; il appartient aux dirigeants haïtiens d’élever au maximum le seuil d’application  de cette constitution en vue de la faire passer dans nos mœurs en tant que nation civilisée.

Les peuples civilisés se plient à leur constitution au lieu de chercher continuellement à la tordre pour la soumettre à leurs caprices, fantaisies et intérêts individuels de tous les jours. La constitution de 1987, bien souvent, n’a pas été appliquée à cause de  la volonté d’un seul homme, le président de la république, de facto ou élu.

Les quelques problèmes de la constitution de 1987 ne dispensent nullement l’Exécutif de l’obligation qui est sienne de l’appliquer et de ne pas la violer.

Il est nettement fallacieux de soutenir que  la constitution actuelle est la cause de l’instabilité, des crises et des malheurs actuels du pays. Ce n’est pas elle qui a empêché les gouvernements de 1987 à date de créer les institutions qu’elle prévoit (Conseil Electoral permanent, Commission de Conciliation, Centres de Recherche, Académie Haïtienne de la langue créole). Ce n’est pas elle qui les a empêchés d’appliquer les lois, de combattre l’insécurité et la corruption, d’assurer la formation des fonctionnaires, des magistrats, de coordonner l’action de la police et de la justice…

La clarté, la précision, la haute valeur technique et les compromis institutionnels de nos constitutions n’ont jamais empêché nos dirigeants de les violer ou de refuser de les appliquer. C’est dire que ce n’est ni la perfection d’un texte constitutionnel ni sa capacité de plaire à tous qui en assure l’exécution. L’application de la constitution et des lois et le fonctionnement harmonieux des institutions dépendent, avant tout, du leadership, du patriotisme et de l’attachement de nos dirigeants aux principes et valeurs démocratiques.

Un régime comme celui de M. Préval (1991-2009)  qui n’a aucun bilan positif à offrir, et sur le plan constitutionnel et sur le plan socioéconomique, devrait plutôt se pencher sérieusement aujourd’hui sur les problèmes urgents qui dévorent la Nation au lieu de faire diversion et de chercher à ouvrir la boite de Pandore et contre lui-même et contre le pays.

Décidément, Jupiter rend fous ceux qu’il veut perdre.

Luc Rémy
Février 2009

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