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Ayiti

Projet voilé d'annexion souhaitée

Dunois Erick Cantave

Il est absolument aise pour certains de concevoir le maintien du gouvernement actuel pendant que l'insécurité et la misère semblent se circonscrire a certains secteurs et quartiers de la capitale et des villes de provinces sans en donner les véritables éléments de solution et sans prendre les moyens de les mettre en œuvre. Il est aussi facile et simpliste d'attribuer la cause de nos trop nombreux échecs a nos seuls dirigeants haïtiens qui se sont succèdes a la tête du pays. Cela consisterait à placer Haïti depuis sa genèse dans un espace clos et croire le pays capable de se suffire a lui-même en tout temps sans se dégrader et a même de vivre dans une complète autarcie…

Nous avons subi un embargo réel et non virtuel durant près d'un siècle après avoir combattu l'ordre esclavagiste injuste et accède à la liberté et à l'indépendance. Nous avons aussi subi les rigueurs d'un embargo moderne durant trois ans de 1991 a 1994 mais demande cette fois-ci par nos propres dirigeants suite aux errements et excès des uns et des autres. Il ne serait pas juste de dire qu'un Etat ayant deux cents ans d'existence n'aurait pas subit les graves conséquences de ces sanctions commerciales et économiques dans son développement a ses premiers balbutiements en tant que nation et récemment encore appliquées dans un contexte de réel pauvreté et de pénurie extrême.

Il n'est pas non plus question de nous lamenter sur notre sort car, malgré les contraintes naturelles et celles qui nous ont été imposées, nous pouvions faire preuve de plus de responsabilité et de patriotisme vis a vis du pays et de nos concitoyens.

Nous sommes laisse aller a nos pulsions et inserts personnels, au pillage systématique des maigres ressources de l'Etat et n'avons pas fait beaucoup d'effort pour contourner nos difficultés et permettre ainsi a la majorité de jouir des fruits de son travail et d'accéder au statut de citoyen vraiment libre participant pleinement a l'épanouissement et l'émancipation de la société. Par le manque de vision, l'impréparation de la plupart de nos gouvernants, l'appétit démesure de nos élites, par l'iniquité des ordres mondiaux predonimants qui se sont succèdes et une dépendance accrue de notre économie, cette majorité paysanne a systématiquement été transformée en un amas de pauvres vivant dans la promiscuité, l'insalubrité, dans des conditions infra-humaines des bibonvilles appendices des différentes villes du pays.

Cette situation a engendre une violence sociale structurelle qui culmine et se confond par moment avec nos querelles politiciennes intestines souvent improductives mais parfois nécessaires au changement indispensable pour sortir de la routine et de la violence imposées par les dictatures. Situation réelle et paradoxale qui ne saurait être une apologie de la violence, mais plutôt une analyse des circonstances qui l'engendrent, l'alimentent et sur laquelle parfois nous n'avons plus grand contrôle du fait même de la faiblesse ou de l'absence de nos institutions et des trop grandes inégalités sociales qui sévissent au pays…

Malheureusement, aujourd'hui encore, nos élites semblent vouloir, à l'instar de celles d'autres pays durant leur histoire, démissionner, appeler et s'accommoder à une tutelle, à un protectorat, voire a l'annexion du territoire tout en faisant semblant d'être contre une telle option.

Elles refusent quasiment de rechercher et d'adopter des solutions endogènes qui pourraient bénéficier du concours de nos amis de l'internationale, mais préfèrent plutôt, sous couvert d'un certain pragmatisme, réclamer de manière a peine voilée l'intervention militaire étranger, la tutelle de certaines institutions internationales et sa radicalisation jusqu'à une prise en charge totale du pays. Ces éléments se retrouvent à l'intérieur de différentes organisations politiques et sociales du pays. Ils n'hésitent pas, la réalité oblige, a faire parfois le constat de l'inefficacité et de l'incapacité de l'équipe dirigeante, essayent adroitement de les étendre dans des sophismes a tous les haïtiens comme s'il s'agissait d'un irréductible atavisme, et insistent en tentant encore de persuader le peuple haïtien de continuer cette même expérience qui, par le jeu de leur soi-disant pression, de leurs inserts inavoués et par la magie des dieux se transformera en performance.

De plus, au lieu de réclamer le désengagement des soldats des Nations Unies (MINUSTAH) et le renforcement des moyens locaux de contrôle de la violence, ils réclament au contraire un durcissement des moyens mis en œuvre par la MINUSTAH au point même de susciter a plusieurs reprises la mise au point du commandant brésilien des troupes en Haïti qui s'acharne a expliquer qu'il commande une mission de paix des Nations Unies et non des forces d'occupation. Encore un peu, il nous dirait de ne pas l'obliger a être plus royaliste que le roi et a créer un précèdent qui pourrait être prejuduciable a son propre pays. Ces internationalistes, mondialistes sans point d'ancrage, qui par ailleurs se disent haïtiens, a l'avant-garde de l'effacement utopique de toutes les frontières, trouvent aussi des chantres de ce projet dans certains journaux et radios de la capitale.

Le meilleur moyen de gravir les autres échelons vers l'annexion est de persévérer dans l'erreur et d'obliger la communauté internationale a faire le constat de l'impossibilité pour cette nation de s'en sortir sans le concours agressif et souvent intéresse de l'étranger, et également de démontrer le danger qu'elle représente pour la stabilité régionale du fait même de son incapacité a remplir valablement son rôle dans le concert des nations modernes et développes ou de celles qui cherchent encore leur voie de développement et leur salut…

Heureusement que ce projet voile de protectorat et d'annexion souhaitée par une bonne partie de l'oligarchie haïtienne fait face aujourd'hui a des obstacles objectifs importants d'ordre économique, psychologique, social, et même moral qui entravent son adoption et sa mise en œuvre. Mais seront-ils toujours présents et pendant encore combien de temps ?

Patriotes haïtiens, nous devons faire preuve de clairvoyance, d'une grande combativité, de détermination et d'imagination pour d'abord comprendre les enjeux et ensuite faire face a ces gros inserts qui parfois aveuglent même les meilleures volontés du monde. De ces contradictions, nous devrions être capables, sans aucun chauvinisme ni repli sur nous-même, de lutter afin d'imposer notre point de vue et entreprendre tous les efforts nécessaires pour l'harmoniser avec ceux des autres. En d'autres termes, il nous faut un agenda national qui ne soit uniquement constitue de la réalisation d ‘élections diviseuses, mais aussi et surtout de la mise en œuvre d'un programme d'institutionnalisation et de développement moderne conçu, pilote par nous autres haïtiens, capable d'accommoder et d'orienter toutes les sensibilités vers un progrès national tangible et durable.

Port-au-Prince, le 7 decembre 2004

Dr Dunois Erick Cantave

Viré monté