Potomitan

Site de promotion des cultures et des langues créoles
Annou voyé kreyòl douvan douvan

solitude

Umar Timol

s'aimer, s'entredévorer, au fil de nos perditions,
le temps désœuvre nos attaches
on use les mêmes mots
mais ils sont désormais d'une autre langue
on procède à la jouxte des corps
mais ils ne peuvent défaire l'usure des sentiments
on ne cesse pour autant de tendre vers l'autre
on renoue ainsi la ferveur des premiers jours
mais l'ombre, ombre qui refuse la légitimité de la lumière,
se disperse, s'étend en nous, contre notre vouloir,
en-deçà, au-delà, à travers nos songes calcifiés

on ne peut au fond épuiser la solitude
on cartographie des lieux qu'on nomme tendresse ou amitié
qui nous perpétuent dans l'autre
tandis que les plus inconscients, les plus intrépides
exultent le pouvoir et la séduction
ceux qui sont lucides ressassent les débâcles du précaire

parfois au bout de nos nuits
on aperçoit un regard, receleur de l'absolu,
et on se met avec désespoir presque
à y chercher un vœu, une promesse,
qu'il nous rende à la vie, qu'il nous complète
mais ce regard n'a d'autre morale
que celle qui nous révèle
que nous sommes des apatrides toujours         

ainsi on ne peut oser qu'une appartenance
d'être par la grâce touchée,
le sourire de son enfant
ou l'étreinte d'un amour qui s'en va,

cette grâce qui dénue, qui fusille la solitude

Viré monté