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La spirale de l’ignorance

Yassir Mechelloukh

 

L’ignorance est la disposition de l’esprit qui est la plus éloignée de la nature de l’esprit. Parmi les habitudes de l’homme moderne, il existe certes son incapacité à filtrer les informations, le manque de discernement parmi ce qu’il reçoit. Malheureusement, l’ignorant prend ses informations de ceux qui déforment les vérités à leur compte. En somme, il est clair que l’homme de science n’adresse pas la parole à l’ignorant, car il sait qu’on ne peut secourir un homme à sa place. L’état d’ignorance n’est pas l’état de celui qui est victime de son isolement, mais de celui qui refuse de se libérer. Le demandeur de science est celui qui est d’ores et déjà sorti de l’état de l’ignorance. L’ignorance repose sur un emprisonnement, une aliénation à partir desquels l’individu est dans une sphère dont les limites sont difficilement franchissables. Le demandeur de science est dans le processus d’ouverture qui conduit à la sagesse. «L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit» (Aristote, Discours de morale). L’ignorant est l’ennemi de lui-même, le sage est l’ami de lui-même. L’un manifeste le plus grand refus, le plus grand repli aliénant, l’autre est dans la plus grande volonté et le plus grand désir de la connaissance. En somme, l’ignorance doit-elle être visible, exposée, remarquée ou plutôt dissimulée, discrète, absente? Que l’ignorance des nations soit véritablement perçue, il s’agit là de l’ostentation même du malheur de l’univers. En revanche, l’ignorance est une représentation susceptible de provoquer une prise de conscience déterminante parmi les populations. En la solitude, l’ignorant trouve certainement un moyen pour sortir de gouffre dans lequel il est enfermé. «Il serait étrange de présenter un raisonnement à des gens qui ont besoin non d’un raisonnement mais d’une épreuve.» (Aristote dans Ethique à Eudème) Au reste, le raisonnement n’est utile qu’à celui qui est disposé à l’entendre. Pour prendre en compte un raisonnement, l’homme doit raisonner par lui-même. La solitude est l’épreuve de la confrontation avec soi-même. Les savants et sages auront compris, in fine, que s’écarter de l’ignorant est un bien mutuel, parce qu’un tel détachement laisse l’ignorant livré à lui-même et protège le sage des considérations vaines et irraisonnées.

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