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Pouchkine descendant
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Mon propos n’est pas ici de faire D’Alexandre Pouchkine (1799-1837), fondateur de la littérature russe moderne, mais arrière petit-fils d’esclave, sans doute, du nord du Cameroun, acheté puis vendu par le sultan au tzar Pierre le Grand qui en fit son filleul et plus tard le plus ingénieur militaire de son temps, le précurseur de la négritude, de la créolité ou de la philosophie du tout monde, mais c’est un fait, ni Pouchkine, ni ses ascendants, pas davantage que ses descendants, parmi lesquels le fameux général russe blanc, le baron Pierre Nicolaïévitch Wrangel, ne renièrent jamais leurs racines noires. Le cas échéant, d’autres le feront mieux que moi et ne manqueront pas d’arguments percutants. Pour ma part, je trouve hasardeux d’associer un destin personnel à des doctrines qu’il ne pouvait ni connaître ni même pressentir. Pour autant, le sujet n’est pas clos et je profite de l’occasion pour rendre justice à trois descendants d’esclaves qui surent, en des siècles difficiles pour le Monde Noir, porter leur art au sommet d’un Monde Occidental qui par ailleurs opprimait leurs peuples d’origine. Il s’agit bien sur de Joseph Bologne, chevalier de Saint-George, 1745-1799, le Mozart Noir, écarté de la direction de L’opéra par une pétition raciste, d’Alexandre Dumas qu’on ne présente pas, et de Pouchkine. Que l’on ne me dise pas qu’ils ont profité des vertus civilisatrices de l’Occident. S’ils l’ont fait, c’est qu’ils en étaient intrinsèquement capables et comme le génie est rarement spontané, c’est qu’ils portaient en eux des apprentissages anciens qu’ils ont su transcender.
Voici, pour conclure, deux textes de Pouchkine, non pour servir mon propos, mais pour montrer que Pouchkine, chantre assumé de l’âme russe, n’oubliait pas l’Afrique de son bi-aïeul. Belle leçon pour notre monde crispé sur ses acquis, prêt à dresser des forteresses pour enfermer sa vie et celle de ses enfants.
Je me sens, en lisant ces deux textes, très proche de Pouchkine sans vouloir l’annexer, cela va évidemment de soi.
©José Le Moigne
10 février 2016-02-10
Aurais-je un jour ma liberté ?
Il est temps, grand temps; je l’implore
Au bord de la mer j’attends le vent;
Je fais signe aux voiles marines
Sur le suroît défiant les flots
Quand prendrais-je mon libre essor
Au libre carrefour des mers?
Il faut fuir les bords ennuyeux
D’un élément qui m’est hostile
Et sous le ciel de mon Afrique
Regretter la sombre Russie
Où j’ai souffert, où j’ai aimé,
Où j’ai enseveli mon cœurAlexandre Pouchkine, Eugène Onéguine.
- A propos, monsieur Pouchkine, vous et votre sœur avez du sang noir dans vos veines ?
- Certainement.
- Est-ce votre aïeul qi était nègre ?
- Non, il ne l’était plus.
- Alors, c’était votre bi-aïeul ?
- Oui, c’était mon bi-aïeul.
- Ainsi, il était nègre. Oui, c’est cela … Mais alors, qui était donc son père, à lui ?
- Un singe, madame.
Cité par Pierre Abramovitch Hannibal, neveu de Pouchkine dans Chronique Familiale.