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Alix DAMOUR, l’être surpluréel

Saint-John Kauss

Alix Damour, né en un quelconque endroit inconnu d’Haïti. Poète et journaliste, théoricien du surpluréalisme, il a marqué toute une génération. Grand voyageur, il a vécu successivement en république dominicaine, en Haïti, au Japon et à New York où il est mort en 1990.

Il a publié en 1980 Pages blanches et un poème pris en otage, quelques années plus tard, Ruelle Vaillant de nos amours et Carlos Grullon (1988), et nous a laissé plusieurs inédits comme Dieu sait-il que le soleil est parti en voyage avec une vierge (roman, inédit). Alix Damour admirait Pedro Mir, le grand poète dominicain; Yukio Mishima, le grand romancier japonais; et Pablo Neruda, le grand poète chilien.

 

PAGES BLANCHES
        (fragment)

fragilité de l’idée germe la vie sur la
route de l’incertain mon île collée
sur ma peau ma parole cantique
bruit que le bruit résonne dans les profondeurs
l’heure n’a pas renversé mes rêves de douleur
clameur de l’erreur d’exister pour des mots
de musique et de lumière
                     j’écris et je dis
mon œuvre mouillée de sang qui
                     m’étreint et m’étrangle
je suis tâché de sang  ma plaie béante
dans le silence des mois de touffeur
si la parole n’est pas blessée ce
matin aux braguettes de pue j’irai
baiser les lèvres de l’aurore
mon poème d’eau
du siècle aux sons multiples
la flamme quadrangulaire patrouille
sur les espaces de mes soupirs d’homme
qui a changé la mouvance de l’illusion
aux recoins des monuments baignés
d’images de dieux?

 

je n’irai plus vers les grandes
assiettes de rayons mes poumons
sont remplis des brûlures du temps
civilisation du papier et du dire je vous
salue ma gorge nouée s’englue
au-delà des directions du soleil
j’enlève les rideaux et mon ombre
a volé vers le hasard bras tendus
yeux crevés mes rayons cherchent les
bleus des grands espaces royaume
de fous genèse du bien parler j’appelle
les jours au chevet de mon poème
regarde les rubans mouillés de mon
âme en détresse pieds nus j’ai marché,
erré sur les côtes des vibrations
l’air libre m’empoigne dans le désastre
j’ai vu dans les contrées de la danse
l’angoisse de la terre

pourquoi es-tu assise souffrance
sur les branches des arbres éternels?

         (Pages blanches et un poème pris en otage)

 

Un enfer de bêtes sauvages
Jamais vues depuis la création
du monde
Le sang
du sang
Par le sang
Pour le sang
Toujours du sang
Ruelle Vaillant de mes Amours
devenue en un clin d’œil
Une rivière de sang
Et ce pays est devenu
par la grâce des
Horreurs
Une fabrique de sang
Mais ce sang des hommes
et des femmes
Nous dit dans nos rêves
que le ciel est à partager
que le monde sera libéré
du mensonge
que notre peuple trouvera
peut-être le chemin
                    des libertés
                    de la Démocratie
                    et de la Révolution

(Ruelle Vaillant de nos amours et Carlos Grullon)

 

 

  • DAMOUR (Alix): Pages blanches et un poème pris en otage, Damour, Port-au-Prince, 1980; Ruelle Vaillant de nos amours et Carlos Grullon, [sans nom d’édition], Port-au-Prince, 1988.
     
  • DAMOUR (Alix) et KAUSS (Saint-John): «Pour une nouvelle littérature: Le manifeste  du  surpluréalisme», in Brèves Littéraires, Laval (Québec), hiver 1992; in Les Saisons Littéraires, Montréal, no 2, printemps 1995; in Haïti en Marche, Miami, vol. IX, no 19, 21 juin 1995; in Présence, Montréal, vol. 1, no 4,  septembre1997; «Pour une nouvelle littérature: Le manifeste du surpluréalisme» (2e partie), in Présence, Montréal, vol. 2, no 10, mars 1998; «Pour une nouvelle littérature: Le manifeste du surpluréalisme» (3e partie), in Présence des Îles, Montréal, vol. A, 102, 29 avril - 5 mai 1998; «Pour une nouvelle littérature: Le manifeste du surpluréalisme» (dernier manifeste), in Présence, Montréal, vol. V, no  2015, décembre 2001, pp. 4-7.

 

8.1.2012

Viré monté