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| Je demande pitié pour les femmes ! 
 Santo Antao, Cap Vert, juillet 2009. Photo F. Palli | 
Je demande pitié pour les femmes ! Pour ces corps fracassés, brûlés,  assassinés que l’on retrouve un soir ou un matin au carrefour de la haine.
	      Je demande pitié pour ces amours violentes qui attentent à la vie comme  s’il s’agissait d’une truie qu’on abat.
	      Je demande pitié à ces hommes égarés qui confondent la femme et la  propriété.
	      Je demande pitié pour tous ces désamours qui déchirent l’amour comme  une feuille de papier.
	      Je demande pitié pour les femmes qui veulent leur liberté et que l’on  emprisonne dans la mort.
	      Je demande pitié pour ces mères qui n’enfantent que la mort pour  cause de désaccord.
	      Je demande pitié pour la vie, pour le droit à la vie, pour le respect  de la vie.
	      Je demande pitié pour celles qui ont trébuché, qui ont menti ou qui  tout simplement veulent changer de destin.
	      Je demande pitié pour ces sœurs auxquelles on ôte la chance de vivre en  sœur des hommes.
	      Je demande pitié pour les femmes qui ne sont pas des saintes et qu’on  jette au bûcher comme des sorcières infâmes.
	      Je demande pitié pour les femmes qui veulent dire adieu ou simplement  au revoir et dont on tranche les liens à coups de couteau, de pierre ou de  fusil.
	      Je demande pitié pour la Guadeloupe afin que les hommes comprennent que  la vie est plus grande qu’eux, plus respectable que leur orgueil, plus  généreuse que leur égoïsme, plus sacrée que leur honneur.
	      Je demande pitié pour le sang versé, gaspillé, éparpillé exigeant que  les hommes comprennent que le sang est précieux, que la femme ne doit pas être  la cible de leurs frustrations, de leur incapacité à aimer, à dialoguer, à  comprendre, à pardonner, à partir ou à construire une relation qui soit  vraiment humaine.
	      Je demande pitié en ma qualité de fils, de mari, de père, de frère.
	      Je demande pitié pour que les hommes dominent en eux l’instinct bestial  de la colère, l’instinct tueur, le réflexe meurtrier, la pulsion assassine.
	      Je demande pitié pour que les hommes et les femmes retrouvent dans ce  pays l’honneur et le respect de se donner la main par-delà les douleurs, les  malentendus, les jalousies et les divorces.
	      Je demande pitié car en tuant une femme, coupable réelle ou imaginaire,  c’est la dignité de l’homme qu’on assassine.
	      Je demande pitié car une société se mesure à la façon dont elle traite  les femmes.
	      Je demande pitié pour que cesse le désastre des orphelins, des familles  endeuillées, des parents éplorés, des cimetières honteux d’accueillir des  martyrs.
	      La pire des défaites pour une société c’est de se saborder en crimes  passionnels, crapuleux, fous et désespérés.
	      Je demande pitié pour les femmes car je me souviens que toute femme est  la mère de la vie.
Ernest Pépin
            Le 2 novembre 2008 

