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La sous-traitance peut-elle supporter
un salaire minimum de 200 gourdes? (II)

Fritz Deshommes

Novembre 2009

Dans la première partie de cette section, nous nous sommes évertué à déterminer les charges dont pourrait être redevable la sous-traitance si le salaire minimum légal venait à passer à 200 gourdes. La  somme des salaires,  des autres coûts variables et des coûts fixes s’élève à 133.11  millions de dollars l’an.

Il  s’agit  maintenant d’examiner la mesure dans laquelle le secteur de l’assemblage peut supporter ces charges. En d’autres termes, la sous-traitance est-elle capable de générer suffisamment de revenus permettant de couvrir les charges encourues et de dégager un bénéfice raisonnable aux yeux des entrepreneurs?

Nous allons, dans cette deuxième partie, identifier les rentrées du secteur en utilisant les informations fournies par les employeurs ainsi que  d’autres sources plus indépendantes.  Nous serons alors mieux armés pour estimer les résultats nets d’exploitation et les  indicateurs associés. On verra alors si toute velléité de porter le salaire minimum à 200 gourdes risque de conduire le secteur à sa perte, comme l’affirme l’étude du SMG. Ou si, au contraire, l’impact n’en serait qu’une diminution des marges bénéficiaires, lesquelles demeureraient encore substantielles?

Il  importe de rappeler que le présent texte constitue la quatrième  publication d’une série  sur la problématique  salariale de  la sous-traitance en Haïti. Les trois premiers sont les suivants:

  1. «Critères et Modalités de rémunération  dans la sous-traitance» (5 novembre 2009);
  2. «Emplois, Protection Sociale et Masse  Salariale dans  la  sous-traitance» (12 novembre 2009);
  3. «La sous-traitance peut-elle supporter un salaire minimum de 200 gourdes? (I)» (19 novembre 2009).
  1. Les revenus de la sous-traitance

A part les données fournies par le  SMG, sont considérés, à partir des statistiques de la Banque de la République d’Haïti (BRH):

  • le chiffre des ventes brutes  du secteur ou chiffre d’affaires;
  • la valeur ajoutée;
  • la «valeur ajoutée ajustée»

4.1-  Chiffre de vente ou chiffre d’affaires

L’étude du SMG estime les revenus du secteur à 134.1 millions par an. Elle part du nombre de minutes standard vendues (43.5 millions par semaine) au prix de 5.09 cts la minute. Soit un chiffre de ventes de 114 millions de dollars. La différence est fournie par l’apport supplémentaire des entreprises dites «en full package». La valeur ajoutée du secteur est de 107.4 millions de dollars.

Il se trouve qu’il existe d’autres sources d’informations relatives aux revenus de la sous-traitance. Le rapport annuel de la BRH publie régulièrement les statistiques de ventes des entreprises de réexportation, comme le montre le tableau suivant :

Tableau VI: Chiffres de ventes  de la sous-traitance, de 2003 à 2008

 Année

Ventes (en millions de dollars US)

 2003 290
 2004 324
 2005 406
 2006 449
 2007 452
 2008 412

Sources: Département du Commerce Américain, BRH Rapport annuel 2007, données  collectées auprès des responsables.

On peut se rendre compte de la distance abyssale existant entre les deux sources: 134.1 millions pour le SMG, 412 millions pour la BRH1. Plus de 200% de différence! Que se passe-t-il?

Il est difficile de prendre à défaut la BRH dont on connaît le prestige, le professionnalisme, la crédibilité dans l’élaboration de ce type de statistiques qu’elle publie régulièrement depuis des lustres. La fiabilité de ses sources, son indépendance ne peuvent être mises en doute.

Il est vrai que le rapport du SMG n’indique pas la période précise à laquelle se réfèrent ses informations. On sait seulement qu’il a été commandité après le vote de la loi sur les 200 gourdes, le 5 mai 2009, par le Sénat. On sait aussi que sa version finale date de mai 2009. Mais, à aucun moment, les statistiques fournies – notamment nombre d’emplois, chiffres de vente, valeur ajoutée, états financiers, etc. – n’ont été datées. Alors l’explication pourrait-elle se situer à ce niveau ? C’est-a-dire, les statistiques utilisées se rapporteraient-elles à des périodes ou des années différentes?

En considérant le tableau sur les chiffres de ventes fourni par la BRH, même pour l’année la plus éloignée, l’année 2003, qui présente le montant le moins élevé (235 millions), la différence demeure encore très forte, comparée aux  données du SMG (134.1 millions).

4.2- Valeur ajoutée

Il se peut également que nous nous trouvions dans le cadre de deux systèmes de calcul différents avec des références différentes : l’un se base sur des chiffres de vente bruts de produits finis (BRH), l’autre sur des minutes standard vendues (SMG). Les données  pourraient ne pas avoir la même signification, le même contenu
Pour avoir le cœur net, on est tenté  d’utiliser d’autres approches.  Il nous est encore  loisible de faire intervenir une autre notion qui doit avoir la même signification pour les deux systèmes: la valeur ajoutée. Elle mesure l’effort réel de production, la valeur réelle créée par un agent économique dans le processus de production. Le SMG s’y réfère également et l’estime a 107 millions pour la sous-traitance. Là encore, les montants de la BRH sont nettement plus élevés, comme l’indique le tableau qui suit.

Tableau VII: Valeur ajoutée de la sous-traitance de 2005 à 2008

 Année

Valeur ajoutée (en millions de dollars)

 2005 154.62
 2006 169.66
 2007 180.57
 2008 165.09

Source: BRH Rapport Annuel 2007 et informations collectées auprès des responsables de la BRH. 

4.3-  «Valeur ajoutée ajustée»

Mais l’on sait que la valeur ajoutée ne peut représenter à elle seule les revenus de l’entreprise. D’autant plus que le SMG lui-même a utilisé le chiffre d’affaires ou les chiffres de vente plutôt que la valeur ajoutée. Pour faire bonne mesure, dans cette quête de «revenus raisonnables» et dans la perspective d’un rapprochement des deux systèmes de calcul, nous nous permettrons de déterminer un niveau de chiffre d’affaires qui, tout en partant de la valeur ajoutée de la BRH, respecterait la logique de calcul du SMG.

Ce dernier indique une valeur ajoutée de 107 millions par an. Pour un chiffre d’affaires de 134.1 millions, soit une différence de 25%. Nous allons appliquer cette différence aux données de valeur ajoutée de la BRH. D’où le tableau suivant :

Tableau VIII: Chiffre d’Affaires par la «Valeur Ajoutée Ajustée»

 Année

Valeur Ajoutée (en millions de dollars)

«Valeur Ajoutée Ajustée» (en millions de dollars)

 2005 154.62 193.28
 2006 169.66 212.08
 2007 180.57 225.71
 2008 165.09 206.36

Source: Calculé à partir de BRH, Rapport Annuel 2007 et autres informations collectées auprès des responsables de la BRH.

Ainsi nous nous retrouvons avec plusieurs données de revenus:

  • le chiffre de ventes indiqué par le SMG;
  • le chiffre de ventes de la BRH;
  • la valeur ajoutée de la BRH;
  • le chiffre de ventes par la «valeur ajoutée ajustée».

4.4- Le facteur taux de change

Les industriels de la  sous-traitance connaissent bien l’importance de ce facteur. On se rappelle que, lors d’une rencontre au Palais National tenue en juin 2007, des membres de ce secteur se sont plaints des «effets nocifs» de l’appréciation de la gourde sur leurs activités. Le  dollar  s’échangeait alors autour de 36 gourdes. «Certains menacent même  de fermer boutique si la gourde  maintient sa cote face au dollar», rapporte Mr Gary Cyprien du Nouvelliste (3 juillet 2007)2.

A  cette occasion, des pressions auraient été exercées pour  que le gouvernement desserre l’étau de la «rigueur» et promeuve une politique de dépréciation de la monnaie nationale. Histoire de recevoir  plus de gourdes  en échange des dollars que rapportent leurs ventes a l’extérieur. Ils avaient déjà oublié que, 4 ans auparavant, en décembre 2002, le dollar était encore à 28 gourdes3.

Les dirigeants et les techniciens de la Banque Centrale, s’ils étaient plus bavards, auraient  pu nous raconter de nombreuses histoires de  «suggestions» qui leur parviennent  de ces secteurs, dont les revenus sont libellés en devises fortes, et de leurs alliés.

Il importe de noter que, depuis ce fameux débat sur le  «meilleur» taux de décote de la  gourde, la monnaie nationale se déprécie, lentement mais régulièrement. Tous les calculs faits dans le cadre de ce travail se référent à un dollar valant 40 gourdes, soit 11% de plus en deux ans. Mieux encore, le cadrage macro-économique du budget 2009-2010 élaboré par les autorités économiques et financières table sur un dollar à 44 gourdes. Dans cette  perspective, chaque dollar de chiffre d’affaires de la sous-traitance devrait rapporter 4 gourdes supplémentaires au cours de l’exercice 2009-2010. Déjà en novembre 2009,  le dollar franchit allègrement les 42 gourdes4. On pourra faire les calculs, suivant que l’on considère les 134.1 millions déclarés par le  SMG, les 462 millions de ventes brutes,  les 165.09 millions de valeur ajoutée ou les 206.36 millions  de «valeur ajoutée  ajustée».

Par ailleurs, la décote programmée de la gourde aurait été, semble-t-il, dans un premier temps, l’une des options considérées par les  autorités  au tout début du débat sur  les  200 gourdes, en mai 2009, lorsque la loi  venait d’être votée par le Parlement.  Ce qui rappelle, encore une fois, l’importance du facteur taux de change.

5- Marge nette de la sous-traitance

Nous allons, à partir des divers scénarios envisagés, déterminer le bénéfice net du secteur. Rappelons que notre quête porte sur la mesure dans laquelle la sous-traitance peut supporter un salaire minimum de 200 gourdes. Plus prosaïquement, la sous-traitance peut-elle offrir à ses ouvriers un salaire minimum de 200 gourdes tout en continuant à générer des bénéfices raisonnables?

Nous allons considérer diverses hypothèses de revenus envisagées, étant entendu que les charges sont déjà déterminées en fonctions des diverses situations.

5.1- Les indicateurs de bénéfice, suivant les données de revenus du SMG

Premier scénario: revenus du secteur = 134.1 millions de dollars.

Dans le premier scénario, nous adoptons le montant de 134.1 millions de dollars, présenté par l’étude du SMG. Quel en est l’impact sur les bénéfices et la rentabilité du secteur?

Le tableau qui suit reprend toutes les situations déjà indiquées et pour lesquelles les charges totales ont déjà été calculées.

Tableau IX: Bénéfices, marge nette et rendement (Réf : Revenus = 134.1 millions  de  dollars)

 Situations

Charges Totales
(en millions de dollars)

Bénéfices
(en millions  de dollars)

Marge nette
(en %)

Rendement
(en %)

 Situation actuelle réelle 106.24 27.86 20.78 29.02
 Situation actuelle «légale» 114.27 19.83 14.79 20.66
 Perspective 200 gourdes 133.11   0.99   0.74   1.38

Légende: les trois scénarios envisagés réfèrent au calcul de la masse salariale.
Situation actuelle réelle: se rapporte au salaire minimum de 70 gourdes. Tous les avantages sociaux ne sont pas pris en compte;
Situation actuelle «légale»: se rapporte au salaire minimum de 70 gourdes. Tous les avantages sociaux prescrits par la loi sont pris en compte;
Perspective 200 gourdes: se rapporte à la perspective d’un  salaire minimum de 200 gourdes. Tous les avantages sociaux sont pris en compte.

Tableau X: Relations bénéfice/salaires (Réf : revenus = 134.1 millions)

 Situations

Masse salariale5
(en millions de dollars US)

Bénéfices
(en millions de dollars US)

Relations bénéfices/salaires
(en %)

 Situation «actuelle» réelle 46.02 27.86 60.54
 Situation actuelle «légale» 54.05 19.83 36.69
 Perspective 200 gourdes 70.27   0.99   1.41

Légende: Voir Tableau IX

On se rend compte que:

  • Dans la situation «actuelle réelle», c’est-à-dire, un salaire minimum de 70 gourdes, assorti d’une prime de rendement, et dans un contexte de jouissance d’une partie des avantages sociaux prévus par la loi, un bénéfice net de 27.86 millions peut être réalisé. Le taux de marge nette est de 20.78% et le rendement sur investissement est de 29.02%. Rapporté à la masse salariale relative aux 26905 ouvriers, ce bénéfice représente 60.54%;
     
  • La situation dite « actuelle  légale», se rapportant à un salaire minimum de 70 gourdes, un salaire moyen de 173 gourdes et où tous les avantages sociaux prévus par la loi sont octroyés aux ouvriers, permet de retrouver les résultats suivants : un bénéfice de 19.83 millions de dollars pour un taux de marge nette de 14.79% et un rendement sur investissement de 20.66%. Ce bénéfice représente 36.96% des salaires des ouvriers;
     
  • Dans la perspective d’un salaire minimum de 200 gourdes, assorti de toute la protection sociale prescrite par le Code du Travail, on retrouve un bénéfice net de 0.99 million de dollars, un taux de marge nette de 0.74% et un rendement sur investissement de 1.38%.

Pour mémoire rappelons que l’étude du SMG avait présenté des bénéfices de 10.3 millions, un taux de marge nette de 7.7% et un taux de rendement de 14.42%.

Il est clair que, dans tous les cas où le salaire minimum est de 70 gourdes, un bénéfice confortable est dégagé.
Venons-en à la situation qui nous intéresse : le salaire minimum de 200 gourdes.

Les premières données indiquent que, même avec un salaire minimum de 200 gourdes, le secteur ne se trouverait pas en situation déficitaire, encore moins dans cette situation catastrophique décrite lors des récents débats.  Un bénéfice peut même être réalisé.
Reconnaissons tout de suite qu’il est maigre, totalement insuffisant. Avec un taux de rendement de 1.38%, l’investissement productif n’est pas encouragé. Rappelons que le taux d’intérêt  minimum sur les prêts en dollars oscille entre 8 et 10%6.

Est-ce à dire qu’il faut rejeter d’un revers de main la perspective d’un salaire minimum de 200 gourdes?

C’est ici le lieu de rappeler que nous avons adopté toutes les hypothèses de travail du SMG. Nous avons admis que  le nombre d’emplois est de 30,325, que le nombre d’ouvriers est de 26,905.

Nous avons également assumé que les «Autres Charges Fixes», non détaillées, comptent pour près de 50% des charges fixes totales.

Il est alors loisible de se demander : ne serait-il pas possible de diminuer les charges du secteur de telle sorte qu’il puisse dégager un bénéfice et un taux de marge et de rendement raisonnables?

Si nous admettons comme acceptable le bénéfice de 10.3 millions indiqué par le SMG, il faudrait, pour l’atteindre, réaliser des économies de 9.3 millions de dollars qui s’ajouteraient au million (0.99 million) déjà identifié.

Ne se pourrait-il pas que les «autres charges fixes» (24.8 millions) aient été surévaluées ou surestimées?

Et si le nombre réel d’emplois se rapprochait beaucoup plus des chiffres plus souvent cités par les employeurs (22 à 25 millions)? Rappelons à ce sujet que les 70.7 millions  de masse salariale  se rapportent  à une population de  26905 ouvriers.

Un nombre d’ouvriers de 22000 correspondrait à une masse salariale de  57.46 millions.

N’existe-t-il pas la possibilité d’autres économies tant  sur les charges fixes que sur les charges variables?

Nous laissons ouvertes toutes ces interrogations qui montrent que, même en circonscrivant notre analyse à l’intérieur des revenus et des hypothèses de l’étude commanditée et alimentée par les employeurs, la perspective d’un salaire minimum de 200 gourdes dans le strict respect des avantages sociaux prescrits par la loi est parfaitement envisageable.

Mais il y a mieux. Le taux de change de la gourde. Toutes les statistiques de référence se rapportent à un dollar valant 40  gourdes alors que le cadre macro-économique utilisé par les autorités économiques et financières pour l’année 2009-2010 prévoit un dollar à 44 gourdes. Les employeurs vont donc gagner 4 gourdes sur chacun des 134.1 millions de dollars gagnés dans la sous-traitance. Soit un supplément de revenu de 536.4 millions de gourdes, de beaucoup supérieur au montant à combler (9.3 millions de dollars ou 372 millions de gourdes) pour réaliser un bénéfice confortable dans la perspective d’un salaire minimum de 200 gourdes. Déjà, à  la mi- novembre 2009, le taux de référence  de la BRH dépassait  42 gourdes!

5.2- Les indicateurs de bénéfice selon les statistiques de revenus de la BRH

Et si nous faisions appel à des sources indépendantes?

Toutes les possibilités de revenus identifiées plus haut se retrouvent dans le tableau suivant qui s’en tient à une seule situation : la perspective d’un salaire minimum de 200 gourdes, générant une masse salariale de 70.27 millions aux ouvriers et des charges totales de 133.11 millions.

Tableau  XI: Marges et rendement de la sous-traitance (Réf: statistiques de revenus de la BRH)

Revenus
(en mio de dollars US)

Bénéfices
(en mio de dollars US)

Taux de marge
(en %)

Taux de rendement
(en %)

Relations bénéfices/salaires
(en %)

412.0 278.89 67.69 389.51 396.88
165.09 31.98 24.03   44.66   45.51
  206.36   73.25 55.03 102.30 104.24

Pour mémoire:
Charges totales: 133.11 millions de dollars
Salaires des ouvriers 70.27 millions de dollars

Il apparaît clairement que:

  • Dans tous les cas, des bénéfices substantiels sont dégagés avec  des taux de  marges et de rendement plus que confortables;
     
  • Les plus gros bénéfices sont engrangés en considérant les ventes brutes totales du secteur à partir des produits exportés. Pour l’année 2008, la BRH indique un montant de 412 millions de dollars. Le bénéfice dégagé est énorme : 278.89 millions, soit près de 4 fois le salaire des ouvriers. Les taux de marge et de rendement se situent respectivement à 67.69% et 389.51%.
     
  • Les données tirées de la valeur ajoutée paraissent plus «raisonnables»: un revenu de 165.09 millions générant un bénéfice net de 31.98 millions, soit 24.03% de marge nette et 44.66% de rendement. Le rapport aux salaires des ouvriers est de 45.51%;
     
  • Avec cette notion que nous avions introduite de «valeur ajoutée ajustée», les revenus passent à 206.36 millions de dollars. Le bénéfice augmente à 73.25  millions, soit 104.24% le salaire des ouvriers. Le  taux de marge est de 55.03% et le rendement passe à 102.30%.

Et là nous ne faisons même pas intervenir les gains de change qui doivent découler d’un dollar à 44 gourdes tel qu’envisagé par les autorités économiques et financières.

6- La sous-traitance est parfaitement capable de supporter un salaire minimum de 200 gourdes

A l’analyse de toutes ces données, une seule conclusion s’impose : la sous-traitance a la capacité de supporter un salaire minimum de 200 gourdes, sans risque de se ruiner ou de perdre des emplois massifs.

Notre conclusion est basée sur des chiffres précis se rapportant aux coûts, aux revenus et aux bénéfices du secteur.

Pour les coûts nous avons adopté l’essentiel des informations et des hypothèses de l’étude commanditée par les patrons. Même  si cette dernière semble avoir surestimé les charges devant être couvertes. Le seul point sur lequel nous sommes intervenu concerne la masse salariale, laquelle offre la possibilité de calculs autonomes si l’on connaît le nombre d’ouvriers et les salaires moyens. Ces données sont d’ailleurs tirées de la dite étude. Nous avons également tenu à demeurer dans le cadre légal en  vigueur en insistant pour que tous avantages sociaux prévus par le Code du Travail soient octroyés aux ouvriers.

En ce qui a trait aux revenus, nous avons fait appel aux statistiques indépendantes de la BRH avec un souci de rapprochement avec celles du SMG. De manière systématique, les montants sont plus élevés que ceux du SMG.

Mais même avec les données du SMG, les possibilités de dégager des bénéfices confortables dans le cadre d’un salaire minimum de 200 gourdes demeurent raisonnables. Surtout si l’on considère les options indiquées  de rationalisation/réduction  des charges, notamment les «autres charges fixes» et/ou les gains de change envisageables.

 Cela dit, il importe de s’interroger sur les raisons pour lesquelles les employeurs se sont opposés avec une telle véhémence au salaire minimum de 200 gourdes.

Nos calculs sur les coûts comporteraient-ils quelque erreur?  Côté revenu, se peut-il que les statistiques de la BRH ne soient pas aussi fiables que nous le pensons? Existe-t-il des données que nous ignorons?  Ou des aspects du fonctionnement du secteur qui ne sont pas mis au grand jour et qui justifieraient objectivement les positions des employeurs?

Si tel est le cas, relançons  le débat. Sur les chiffres de la sous-traitance, cette fois.  Approfondissons-le. Elargissons-le.

De notre coté, nous avons quelques hypothèses d’explication. Nous nous proposons de les partager avec nos lecteurs dans la prochaine section.

Notes

  1. Nous considérons le chiffre de l’année la plus récente,  2008, en supposant que les données du SMG se rapportent également à cette année. Mais, comme on  le verra par la suite, ce n’est qu’une supposition.
     
  2. Cyprien Gary L. «Appréciation de la gourde : Entre Satisfaction et Mécontentement», Le Nouvelliste du 3 juillet 2009.
     
  3. Deshommes, Fritz, «Critères et Modalités de rémunération dans la sous-traitance”, 5 Novembre 2009.
     
  4. Site de la BRH, taux de référence du 10 au 17 novembre  2009 : le dollar était à 42.1827 gourdes.
     
  5. Deshommes, Fritz, “Emplois, protection sociale et masse salariale dans la sous-traitance”, 12 novembre 2009.
     
  6. BRH, Evolution des  taux d’intérêts  débiteurs et créditeurs sur les  opérations en devises, ici en pdf.

 

 Viré monté