Kébek

Prévenir l’effet du vide affectif
entre la jeunesse et l’âge d’or

Face à la détresse des jeunes, le chanteur Dany Bédar
déclare: «Il faut créer l’espoir.» J’ajouterai, il faut créer l’espoir
pour combler le vide des jeunes et des aînés

Marie Flore DOMOND
 

Qui n’a pas vu à la télévision le signalement des dialogues de sourds que nous entretenons d’une manière ou d’une autre avec les jeunes qui nous entourent. Le gouvernement du Québec s’est déjà engagé à nous démontrer qu’une oreille attentive envers les adolescents peut s’avérer un investissement capital dans leur avenir.

Vous souvenez-vous de cette belle scène de prévention, où papa se trouve au salon et entend le bruit infernal et incommodant de la musique de son fils enfermé dans sa chambre, d’un pas décidé, il se dirige vers ce dernier qui, lui, appréhende des reproches de son paternel. Dénouement heureux, le père a choisi de s’informer sur le loisir préféré de sa progéniture. Et la campagne de sensibilisation s’était étirée sur de nombreuses mises en situations, entre autres, le jeune qui est installé sur un matelas de magasin à grande surface et qui raconte ses petites misères quotidiennes à un vendeur. Ce dernier, n’entend qu’à faire une transaction économique à profit. Tout récemment, on a été séduit par les annonces des AUBERGES DU CŒUR qui nous rappellent les effets de l’inconfort des gens démunis à travers de nos désirs de bien-être personnel. Sans compter les messages de l’organisme JEUNESSE, J’ÉCOUTE où on voit un passant esquivé comme un beau dégât, un amalgame de mots insufflés dans sa direction par un jeune solitaire.

Si les autorités de plusieurs piliers de la société canadienne et québécoise nous exhortent à une meilleure communication avec les jeunes, c’est qu’elles réalisent que la situation d’échanges et de dialogues entre les adultes, parents et enfants est critique et se détériore de plus en plus.

Ces divers messages n’ont pas été seulement diffusés pour agrémenter nos passe-temps audiovisuels, Ils existent pour nous interpeller à nos responsabilités individuelles et collectives à l’égard de nos descendants, les petits frères, les sœurs, les amis, les amis de nos enfants.

Ce n’est pas étonnant d’apprendre que le chanteur Dany Bédar a décidé d’embrasser la cause de la dérive des jeunes en déclarant: «Il faut créer l’espoir.» J’ajouterai à ses propos: «Il faut créer l’espoir pour combler le vide affectif de la relève et des aînés.» Il n’y a pas de doute, celui que je considère comme le magicien des mots qui habitent nos maux n’aura qu’à faire le tour de ses chansons qui parlent de solitude, de souffrance, de peine d’amour pour avoir une oreille attentive à son soutien vocal le 7 mai prochain au parc Maisonneuve à l’occasion de l’activité nationale de levée fonds de Jeunesse. (Marche Bell)

J'écoute "Faire la paix avec l'amour". Mais dans le grand noyau des jeunes en difficulté, on retrouve évidemment, d’autres cellules maladives de toutes les communautés ethniques qui sont imputables à la souche du système d’éducation, de l’application des différents enseignements adoptés par des parents. Et Surtout de certains modèles peu recommandables dont les jeunes sont influencés.

Arwong Pierre

Arwong Pierre, est un citoyen haïtien, un homme de corporation et coopération. Il est le fondateur de l’organisme PHARE JEUNESSE qui a pour extension, le magazine qui porte le même nom. L’organisme désert sa clientèle à différents niveaux. Qu’il s’agit de:

  • Promotions artistique et économiques
  • Spécialisation en auto-financement
  • Intervention en délinquance
  • Relation d’aide aux familles
  • Tutorat et aides aux devoirs
  • Lutte contre la pauvreté
  • Parrainage

L’intervenant est donc un privilégié qui évolue dans l’environnement des jeunes, par conséquent, il est en mesure de décrire les principaux obstacles que confrontent les jeunes dans leur quête d’identité et d’autonomie, leurs désirs et besoin, leur chute ainsi que leur ascension.

Monsieur Pierre, comme intervenant dans le milieu évangélique, vous avez toujours joué des pieds et des mains pour prévenir le dérapage des jeunes. Quelles sont vos marges de manœuvres?

Vous savez, je suis devenu intervenant par amour pour les jeunes, malgré ma formation en relation d’aide et en théologie, l’expérience est acquise sur le terrain. J’en ai vu des choses pendant les dix dernières années! Je puise ma force en Dieu et j’apprécie les précieux conseils de mes leaders spirituels et amis. Je filtre les conseils et je les adapte à la situation de nos jeunes et cela porte fruit.

Le fait que vous soyez dans un milieu dit «chrétien, est-ce que le problème des jeunes se présente de la même façon que les jeunes laïcs?

 Le problème des jeunes du milieu évangélique est plus subtil ou plus sournois que les autres. Par contre quand il y a des dérapages, c’est grave! Les jeunes du milieu évangélique ont plus de problèmes avec leurs parents que d’autres. Les parents veulent à tout prix que ces jeunes suivent leur trace, question de devenir des bons et authentiques chrétiens. Souvent, ces derniers n’ont pas expérimenté eux-mêmes la nouvelle naissance, pour plaire à leur parent, ils s’efforcent de venir à l’église, ce qui finalement dégénère en conflits. Les objets des conflits des jeunes avec leur parent sont, le plus souvent, les fréquentations, l’habillement ou l’influence de la mode païenne, le manque de spiritualité des jeunes aux yeux de leur parent, le non respect des couvre feu et les relations amoureuses des jeunes.

Un jeune du milieu évangélique se confie-t-il plus facilement qu’un autre?

Il est plus difficile pour un jeune du milieu évangélique de se confier. Il y a plusieurs raisons qui expliquent cela.

Le jeune a peur d’être jugé, pour ce, il exprime moins ses émotions et ses peurs. Il y a aussi une question de valeur. Finalement, il y a le lien de confiance. Le jeune sait que l’Être en qui il doit avoir une plus grande confiance c’est Dieu. Toutefois, avec un bon sens d’écoute et de sympathie, on peut y arriver. Si on approche le jeune comme un chef spirituel dans le but de l’exhorter, il finira pour fuir. Mais si on arrive être compréhensif et compatissant on peut gagner sa confiance. Pas facilement, mais on y arrivera sûrement.

Pensez-vous que l’enseignement biblique a une influence directe sur le comportement d’un jeune?

Évidemment. On retrouve deux catégories de jeunes qui vont à l’église. Premièrement, il y a ceux qui y vont par choix personnel et ceux qui sont forcés. Les premiers sont authentiques et la deuxième catégorie n’est pas différente des autres jeunes qui ne vont pas à l’église. On peut trouver des fils de pasteurs qui sont dans les gangs de rue. Toutefois, une chose est sûre, même si la parole ne produit pas un effet instantané dans la vie des jeunes qui fréquentaient l’église ou qui délaissent l’église. L’enseignement laisse des traces positives qui finiront par agir plus tard sur leur comportement, leurs valeurs. C’est le phénomène que j’appelle l’enfant prodigue.

Il y a trois ans de cela, vous avez instauré un concours de chants Gospel afin de canaliser une énergie positive des jeunes de membres de votre organisme. Pouvez-vous me faire le bilan de cette initiative? Et plus, où en êtes-vous avec votre projet de magasin de Friperie?

Le concours Star Gospel, est la plus belle réalisation que j’ai conçue pour les jeunes du milieu évangélique et cela a produit un effet de boule de neige. Je suis content d’être pionnier dans le milieu évangélique et d’avoir été un modèle pour d’autres organisations. Ce qui fait ma joie le plus, c’est de voir des jeunes talents qui sortent de ce concours avec plus de confiance. Notamment, la petite Newtha Gentiné, la jeune fille de neuf ans a déjà sorti son album et a déjà fait la une du Guide de Montréal Nord. Un jeune chanteur comme Olivier Cheuwa, qui maintenant, est en concert en Belgique et plusieurs autres groupes, N2N etc. Le même concept de Star Gospel est maintenant rendu en Afrique où se produira la première édition Star Gospel au Cameroune. J’aimerais aussi que soit instauré en Haïti et établir des partenariats avec d’autres organisations aux États-Unis. Au Canada Anglais, il existe un mouvement semblable à Toronto et nous avons déjà établit un lien avec cette organisation. Bref, j’ai apprécié le travail qui a été fait jusqu’ici et surtout le support indéfectible de Géraldyne Raymond qui m’a beaucoup aidé. Pour la friperie, l’organisme a modifié ses plans, pour mettre plus d’emphase sur le concours et le magazine. Vous savez, nous faisons tous du bénévolat et cela requiert du temps et de l’énergie.

Êtes-vous au courant que l’organisme Jeunesse, j’écoute organise une journée de levée de fond le 7 mai prochain ? Les jeunes de votre organisation ont-ils l’intention de participer?

Bien sûr! Je m’informe des activités des autres organismes et nous les supportons. Nous encourageons toujours nos jeunes à y participer. Et je sais que plusieurs comprennent la problématique et y participeront.

Vous arrive t-il de travailler de concert avec d’autres organismes québécois?

Oui, personnellement je fais partie de plusieurs organisations haïtiano-québécoise. Et je suis sur quelques conseils d’administration.

Nous connaissons toutes les conséquences dévastatrices de la détresse des jeunes entraînés dans le courant des proxénètes, des pédophiles, du décrochage. Advenant que les jeunes décident de garder le silence sur leur problème respectif, quels sont les signes avant-coureurs qui peuvent mettre les parents ou l’entourage sur des pistes?

Les jeunes envoient toujours des signaux aux parents, le plus important c’est d’être attentif. Quand un jeune souffre des troubles de sommeil, quand il devient trop adulte et réfléchit comme un adulte, il faut se poser de sérieuses questions. Dans le cadre d'une autre enquête de l'UQTR, malheureusement, les professeurs qui passent plus de temps avec leurs enfants sont dépassés et impuissants. Plus de 56% des professeurs n’ont reçu aucune formation pour intervenir tandis qu’en moyenne 82% des professeurs reçoivent des confidences de leurs élèves. Le jeune en difficulté veut en parler, mais il n’y a peut être pas d’oreille prête à l’écouter.
 

 
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