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Calendrier des métiers en voie de disparition
Setpembre 2018

Le dernier vannier caraîbe

Hector Poullet

Panier réalisé au cour du stage de formation en 1977-78. Photo Imma Rochas.

La vannerie dite vannerie caraïbe est en voie d’extinction. Il reste, sans doute, quelques personnes au Morne des Esses en Martinique qui connaissent encore les techniques et les plantes de cette vannerie, ainsi que dans le nord de la Dominique dans la réserve de Calibischi, mais cette vannerie destinée aux touristes ignorants respecte-t-elle encore les règles de la tradition des populations Caraïbes d’antan?

En Guadeloupe je ne pense pas qu’il existe ne serait-ce qu’un seul de ces vanniers. Si cette hypothèse était avérée, j’aurais eu la chance d’avoir connu Chicot à Capesterre Belle-eau, la dernière personne à pratiquer cette technique de vannerie selon la tradition des Amérindiens.

D’abord il faut savoir quelles plantes utilisées et où les trouver. Le cachimbou on ne le trouvait que sur les bords de la rivière, sur le site dit Belle Eau, quant à l’arouman il faillait descendre tout au fond de la vallée  du grand Carbet pour rencontrer cette variété de grand balisier.

Ischnosiphon arouma, arouman. Photo Francesca Palli

Il fallait couper les feuilles les plus mûres, ne garder que la nervure principale, puis avec un couteau bien affûté, faire les éclisses. Certaines de ces éclisses étaient enterrées  dans la boue en bordure de rivière, le reste était mis à sécher à l’air et au soleil. Au bout d’une semaine celles qui avaient séchées à l’air étaient d’une couleur marron clair tandis que celles qui avaient été dans la boue étaient d’un marron foncé presque noir. Ces deux couleurs de la même plante étaient définitives. Cette vannerie en damier est une caractéristique de la vannerie caraïbe.

Calathea lutea, cachimbou. Photo Francesca Palli.

Les quatre nappes étaient tressées en quatre groupes de quatre éclisses en alternant les marrons clairs et les marrons foncés. Les nappes étaient en deux épaisseurs celle de l’intérieur était de couleur uniforme en cachimbou, celle de l’extérieur en arouman était en damier.  Les nappes étaient adaptées à une forme, un cadre en bois,  sur laquelle elles devaient se mouler. Entre les deux épaisseurs  des feuilles séchées de siguine devaient assurer l’étanchéité du futur panier. Le couvercle devait s’adapter parfaitement au bas sans laisser place au moindre interstice.
Vous l’avez compris faire un panier n’était pas une chose facile à réaliser, des générations avaient dû travailler pour mettre cette technique au point afin de transporter de la nourriture, en particulier des cassaves, dans des pirogues en gommier pendant des jours de navigation sans le panier ne prenne l’eau.

Je serai certes incapable aujourd’hui de faire un panier caraïbe tel que Chicot nous avait appris à le faire lors des formations qu’il faisait à l’OMCS de Basse-Terre entre 1977 et 1978. Je regrette de n’y avoir pas accordé plus d’intérêt à l’époque car je suis conscient aujourd’hui que cette technique est perdue à jamais. Dommage car c’est ainsi que disparait le patrimoine des ancêtres.

Paniers de la Vannerie de Martinique au Morne des Esses. Photo Francesca Palli.

 

Viré monté