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Le réaménagement de l’église locale

Saint-John Kauss

On entend par «église locale», une église organisée ayant à sa tête un Pasteur attitré, licencié ou ordonné, capable de prendre en charge des âmes en peine ou des âmes perdues. Mais l’église locale a une double fonction; elle est à la fois divine et humaine. Divine par l’intention («je bâtirai mon église», Matthieu 16 :18) et par la réalisation («c’est Dieu qui ajoute à l’église les âmes sauvées», Actes 2 : 47). Humaine, car ce sont des hommes et des femmes que Dieu y ajoutent. Mais qu’est-ce qui fait dire qu’une église locale peut fonctionner? Que devraient être les éléments constitutifs de l’église locale pour sa fonction?

RECRUTEMENT

Un recrutement alerte assure un bon fonctionnement de l’église locale. Les mauvais éléments d’une église sont en général le produit d’un mauvais recrutement. Le rôle du Pasteur consiste à discerner ceux que Dieu appelle à faire partie du corps local sans considérations de préférence, de sympathie ou d’influence.

Selon le monde de recrutement actuel, il existe deux groupes d’églises. Les églises de multitude qui pratiquent un recrutement biologique, c’est-à-dire par la naissance. Et les églises de professants qui recrutent par la nouvelle naissance. Les églises de professants ne peuvent exister qu’en vertu de la distinction entre véritable chrétien et chrétien de nom. Certes, il arrive que des irrégénérés soient «membres» d’une église de professants, mais c’est par accident, malgré les précautions prises, tandis que dans les églises de multitude le mélange est la règle. Il est plus juste, dans ce cas, de parler de «paroisse» plutôt que d’église. Les églises de multitude, en l’occurrence l’Église catholique romaine, les «églises» orthodoxes, les Églises Réformées Évangéliques Indépendantes, par exemple, sont des pédobaptistes. Tandis que les Églises Évangéliques Méthodistes, les Pentecôtistes, les Nazaréens, les groupes de type Baptiste, forment les églises de «professants» qui rejettent le baptême des enfants et ne considèrent comme membres que ceux qui, après avoir fait une expérience spirituelle, ont passé par les eaux du baptême. Donc, la vraie église locale doit être composée de croyants baptisés ou de personnes régénérées, ce qui exclut les nourrissons inconscients, les adultes irrégénérés ou les croyants non baptisés selon le mode biblique. Pour entrer dans l’église locale, il faut donc être né de nouveau, séparé du «vieil homme», du monde. Pourtant des éléments étrangers se sont quelquefois introduits dans les églises locales, même au temps de Jésus. Simon, le magicien (Actes 8 : 18-24), les faux chrétiens du temps de Jean (1 Jean 2 : 19).

Pour parfaire à un recrutement en bonne et due forme, il faut d’abord la légitimité d’une liste de membres. Et les conditions d’admission doivent être celles de la Bible. L’église locale doit accueillir et ajouter à cette liste ceux que le Seigneur ajoute. L’Église ne doit pas être ni plus, ni moins exigeante que le Seigneur. Celle-ci n’a point le droit de repousser ceux qui ont un passé chargé ou qui sont d’une autre couche sociale, de nationalité ou de couleur différente. Par ailleurs, il ne serait pas légitime de favoriser des amis ou de rechercher un intérêt matériel par l’admission d’éléments non appelés par le Seigneur. Nous n’avons pas le droit d’ajouter à l’église locale ceux que le Seigneur n’a pas ajoutés à l’Église universelle. Il faut plutôt s’assurer tout d’abord que le candidat a réellement fait une expérience spirituelle décisive et qu’il s’est vraiment repenti du Péché, c’est-à-dire qu’il a changé d’attitudes en rejetant ses infirmités en pensée, parole et action. Ceci est essentiel pour la protection de l’église, par respect et pour sauvegarder l’honneur de Dieu. D’ailleurs, c’est une façon comme une autre de ne pas compromettre le «bien spirituel» de l’intéressé auquel on donnerait une fausse sécurité en l’accueillant dans l’église sans qu’il soit passé par la conversion vraie et sans avoir la foi.

DISCIPLINE

Aucune institution au monde ne peut fonctionner à long terme sans discipline. Ce terme, pour nous, caractérise plutôt notre statut de disciple acceptant l’ordre établi par le Maître. L’Apôtre Paul disait à Jésus: «Seigneur, que veux-tu que je fasse?» (Actes 9 : 6). De ce fait, si chaque membre d’église vit en authentique disciple selon les enseignements et l’exemple du Maître, cette discipline librement acceptée dispenserait de l’exercice de la discipline corrective, laquelle inclut le traitement et la correction de toutes difficultés ou fautes. Le manque de discipline peut faire perdre à l’église sa puissance de témoignage à la vérité, à la croyance ou à la sainteté. Les scandales et les hérésies que l’on connaît de nos jours font dévier les églises et leurs membres de leur mission, c’est-à-dire les conduisent vers la voie de la mauvaise tolérance, du libertinage et du manque de foi. La chute devient alors si facile que les églises se vident dans toute leur structure. Par l’absence de discipline, le Péché s’enracine et se développe; l’Oeuvre de Dieu étant compromise. Bref, la discipline est présentée dans l’Écriture comme nécessaire à l’intégrité et à la bonne marche du corps local (1Cor. 5 :12). Toute personne indisciplinée dans une église se devrait être évincée, c’est-à-dire l’éloigner des Innocents fidèles ou l’ôter du milieu des Frères (1Cor. 5 :13). Le discipliné, par contre, se doit de s’éloigner des Coupables (Romains 16 :17; 2 Timothée 3 : 5). De fait, la discipline est non seulement éducative mais aussi  préventive.

ORGANISATION

Dieu a établi des sociétés humaines dont la cellule vivante est le microscome. Jésus, avant de laisser la terre, a institué l’Église qui est, de par sa nature, à la fois humaine et divine, physique et spirituelle, terrestre et céleste. Son organisation se doit de situer sur le plan humain des rachetés. L’organisation étant si nécessaire que son absence dans l’église conduit le plus souvent à l’anarchie qui n’est pas de l’obédience du Saint-Esprit. Car «Dieu n’est pas un Dieu de désordre» (1 Cor. 14 : 33). De même que son excès peut conduire au formalisme bureaucratique. L’administration doit être un moyen pour l’église de parvenir à son dessein qui est de bien servir Dieu. Elle aura un rôle d’intendance. Elle permettra d’assurer le bon fonctionnement de l’église par une parfaite coordination des différents services. Bien entendu, l’organisation n’est fiable que par la qualité des hommes qui y sont engagés. Le Pasteur et son secrétaire, l’assistant du pasteur, le trésorier, les diacres et diaconesses, les conseillers ou le conseil consultatif, les leaders des comités (des jeunes, des ainés, ou de la compassion), les serviteurs et servantes, et autres membres de l’église, sont frères égaux en la foi et en Christ. (Matthieu 23 :8). Chacun doit mettre au service des autres le don ou le ministère reçu du Seigneur. En un mot, il faut se connecter entre nous, et outre mesure avec son prochain et les autres églises chrétiennes.

Puisqu’on est au chapitre de l’organisation, soulignons alors que les organisations ecclésiastiques actuelles sont locales, régionales, nationales, internationales ou mondiales. On n’en connaît que trois principales formes: épiscopale ou monarchique (églises romaine, orthodoxe, anglicane et adventiste); synodale, fédérative ou presbytérienne (églises réformées et presbytériennes); congrégationaliste (les nazaréens). De cette dernière, l’autorité réside dans l’église locale. Un seul chef est reconnu, Jésus (Éphésiens 1 : 22). Les églises administrent leurs propres affaires localement, quoiqu’elles aient des structures locales différentes. Cette forme, la plus conforme aux précédents bibliques, est aussi adoptée par tous les congrégationalistes, incluant les baptistes, les pentecôtistes, etc. Tout cela semble démocratique sur le plan humain, mais cette église est théocratique. Dans les réunions administratives, les membres doivent discerner la volonté de Dieu plutôt que de prendre les décisions à la hâte et sans le concours de l’Esprit-Saint (Actes 15 : 28). Néanmoins, ce sont les «diacres», ou les «anciens» qui, en quelque sorte, devraient adjoindre aux pasteurs dans les responsabilités locales (Actes 11 : 30; Philippiens 1 : 1; Romains 16 : 1). Les règlements de conflits locaux, les irresponsabilités du disciple, les indisciplines répétées (immoralité, insoumission, esprit de dispute, division, cupidité, etc.) sont autant de facteurs et déterminants négatifs qu’il faut apprendre à gérer dans l’évolution d’une église.

Comment se forment et s’organisent les églises d’aujourd’hui? L’Apôtre Paul nous a tracé et montré la route qui conduit à l’érection d’une église. Le même processus peut être adopté: recrutement, témoignage personnel, prédication, visites et regroupement. Le pasteur pressenti aura la charge d’instruire individuellement ou collectivement les chrétiens baptisés ou appelés à le faire, qui désirent s’unir dans un même lieu en assemblée. Désignation d’un président et d’un secrétaire de l’assemblée. Préparation, étude et mise au point des documents de base (confession de foi, statuts et règlements internes). Acceptation unanime de ces bases par un vote formel. Motion sous le nom choisi. Élection des responsables (anciens et diacres) sous la conduite de l’Esprit-Saint, qualifications bibliques à l’appui. Application des principes de l’église.

L’organisation désignée doit nécessairement être au service de l’église. Son rôle est un rôle de coordination entre les membres et les fonctions associées. Il est alors essentiel que les responsables s’appliquent à discerner la volonté de Dieu et à veiller à son accomplissement plutôt qu’à prendre des décisions et à les imposer à l’église.

MEMBRES ET VISITEURS

Les membres de l’église locale sont «membres du corps du Christ» (1 Cor. 12 : 27), Jésus étant le chef de l’église, la tête de ce corps. Dans l’église locale, on se doit d’être intégré, incorporé dans une vie commune. Pour cette raison, l’église devrait être centripète, les membres devant s’efforcer de se rapprocher physiquement et spirituellement, alors que l’on constate souvent une tendance centrifuge dans la dispersion, soit sur le plan géographique, soit sur le plan des engagements sociaux ou religieux externes. Chacun et tous devraient rechercher ce qui édifie, ce qui contribue au progrès spirituel de l’ensemble et à la gloire de Dieu. Les membres d’une église locale doivent avoir une attitude consciente face à la beauté de leur vocation, et manifester du respect pour les choses de Dieu (chants, prières, célébration, etc.), favoriser le recueillement devant Dieu par le silence, la réceptivité pour son message, la cordialité envers les Frères ainsi que l’assiduité au service. La participation des membres aux réunions et aux affaires de l’église est primordiale. Car  les réunions, par exemple, sont une manifestation de la vie spirituelle du corps local, un moyen d’instruction, d’édification, de correction, d’échange avec les Frères et avec le Seigneur. Les membres doivent avoir un rôle actif plutôt que passif, en participant aux études bibliques ou à l’école du dimanche, aux chants, aux prières, au culte, à l’avancement de la cause de Dieu par la collecte, à la proclamation de la mort de Jésus par la cène. Dans certaines assemblées, la participation s’étendrait  aussi aux échanges,  aux témoignages, etc. (1Cor. 14 : 26). La tenue des membres doit être simple, naturelle, sans artifices, en rapport avec la morale, la décence, l’Écriture. Car l’identification au schéma du monde est à éviter par le renouvellement de l’intelligence (Romains 12 : 1-2).

En ce qui a trait aux visiteurs, il faut les accueillir fraternellement si ce sont des chrétiens, et aimablement si c’est le contraire. Il faut parfois être prudent et agir avec discernement à savoir si tel visiteur est venu à nous par intérêt spirituel ou par besoin matériel. L’attitude envers les visiteurs doit être aimable, serviable et discrète. Encore plus, les visiteurs, prédicateurs de métier, doivent être les bienvenus. Ils peuvent contribuer à l’enrichissement spirituel de l’église-hôte qui étend sa communion fraternelle grâce à ce représentant d’une autre église, lequel  fait bénéficier de ses dons particuliers et de sa connaissance aux Frères qu’il visite. Toutefois, il ne faut pas que ces visites soient trop fréquentes aux membres, afin de favoriser et de garder l’enseignement systématique reçu de leurs propres conducteurs. Par contre, les visiteurs inconnus ou de doctrine inconnue ne devraient pas prendre la parole à l’église afin d’éviter spirituellement l’empoisonnement des membres.

CONCLUSION

Le réaménagement de l’église locale suppose une expérience particulière et l’appui du district duquel elle dépend. Un pasteur compétent, à vocation, doit être le produit d’un recyclage continu afin de bien jouer son rôle de berger et de conducteur des âmes en déroute.

Références Bibliographiques

  • BUCHHOLD, Jacques : Le pardon et l’oubli, Méry-sur-Oise (France), Sator, 1989.
  • BUHLER, F. : L’église locale, Fontenay-sous-Bois (France),  Farel, 1985.
  • BUNYAN, John : Le voyage du pèlerin, Paris, Frères Estienne Éditeur, 1773.
  • CAMPOLO, Tony and DARLING, Mary Albert: The God of intimacy and action, San Francisco, Jossey-Bass, 2007.
  • CAMPOLO, Tony and DARLING, Mary Albert: Connecting like Jesus, San Francisco, Jossey-Bass, 2010.
  • CHAMBERS, Oswald: Tout pour qu’il règne, La Bégude de Mazenc (France), Ligue pour la lecture de la Bible, 1998.
  • GUITON, William Henri : Introduction à la Bible, Flavion (Belgique), Le Phare, 1973.
  • PACHE, René : L’inspiration et l’autorité de la Bible, Saint-Légier (Suisse), Emmaüs, 1967.
  • SEGOND, Louis : La sainte Bible, Genève (Suisse), Société Biblique de Genève, 2008.

 Viré monté