Potomitan

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Annou voyé kreyòl douvan douvan

Gustave FLAUBERT
An tjè san ganm
(Un cœur simple)

traduit du français par
Raphaël Confiant

Perroquet Ara
Perroquet Ara, Guyane. © P. Giraud.

PRESSES UNIVERSITAIRES CREOLES (GEREC-F)

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  • An tjè san ganm " Un cœur simple" (196 KB, en pdf) traduit du français par Raphaël Confiant. Le texte en français n'est pas complet.
     
  • Dialogue avec les internautes : Critiques et propositions de retraduction sont les bienvenues! Ecrivez-nous ici.

TRADUIRE FLAUBERT EN CREOLE

Dans la vie d'une langue en voie d'accession à la «souveraineté scripturale» (Jean Bernabé, 1983), la traduction des grands chef d'œuvres littéraires étrangers est une étape capitale. Tout le monde connaît l'exemple fameux dès «langues vulgaires» de l'Europe Occidentale qui, au XVIè siècle, époque dite de la Renaissance, ont été utilisées pour traduire les textes de l'Antiquité gréco-latine. On connaît aussi le rôle joué par la traduction de la Bible dans des langues comme l'allemand (Luther), le russe (Cyrille et Méthode) ou encore le finnois (Agricola). C'est que la traduction oblige la langue à sortir de son cocon habituel, elle l'oblige à désigner des réalités entièrement nouvelles, bref à se dépasser, sinon à se surpasser.

S'il est vrai que toutes les langues se valent et que comme l'écrit le linguiste Roman Jakobson, les langues diffèrent moins par ce qu'elles peuvent dire que par ce qu'elles doivent dire, il n'en reste pas moins que les mouvements de l'Histoire contraignent sans cesse les langues à désigner des choses ou des réalités abstraites qui n'appartiennent pas à leur écosystème linguistique.

S'agissant de la langue créole, tant qu'elle était protégée par le cocon de l'Habitation (plantation de canne à sucre), elle pouvait s'épanouir sans difficultés, mais du jour où ce système s'est effondré et qu'elle a été brutalement confrontée à la fois à une autre langue (le français) et à la modernité, elle a commencé à perdre pied. C'est ce que les linguistes appellent la décréolisation. Cela commence par une intrusion massive de mots français (ou anglais à Sainte-Lucie et Dominique) dans le lexique du créole jusqu'à l'adoption de formes syntaxiques (le passif agentif, par exemple) inconnues dans la langue, en passant par l'alignement de la phonologie du créole sur celle du français ou de l'anglais. A terme, le créole devient méconnaissable et est dès lors menacé de disparition.

Comment lutter contre ce phénomène mortifère? Il faut d'abord équiper la langue c'est-à-dire la doter :

  • d'une graphie stable.
  • de dictionnaires, grammaires, traités de style etc…
  • d'œuvres littéraires.
  • de textes non littéraires (juridiques, sociologiques, scientifiques etc…)

En ce début du XXIe siècle, le créole dispose déjà de tout cela, à des degrés divers bien sûr. Si la question de la graphie semble trouver un consensus autour de celle proposée par le GEREC-F, force est de constater que les grammaires se multiplient alors que les traités de style se font encore attendre. Force est aussi de constater que si les textes littéraires font florès, leurs équivalents scientifiques sont encore très rares. Mais le mouvement est lancé et d'ici à deux ou trois décennies, il est certain que le créole disposera de tout l'arsenal nécessaire pour affronter la bataille mondiale des langues qui s'annonce.

Il y a un domaine, cependant, dont les créolistes et les défenseurs du créole n'ont pas encore pris toute la mesure jusqu'à ce jour: il s'agit de celui de la traduction. Il existe certes une tradition de «traduction» des Fables de La Fontaine en créole datant du début du XIXè siècle et, plus récemment, de la Bible et d'autres textes religieux chrétiens, mais ces travaux aussi méritants soient-ils ont fait l'impasse sur une réflexion des conditions de possibilité de la traduction en contexte diglossique. On ne traduit pas, en effet, de la même manière en contexte monoglossique ou quasi-monoglossique et en contexte diglossique.

Traduire «Hamlet» de Shakespeare en français n'est pas la même chose que traduire ce même texte en créole. Et cela non pas seulement parce que le français est une langue patinée par dix siècles d'usage littéraire, ce qui lui donne une capacité d'appréhension du texte anglais autrement supérieure à celle d'une langue jeune comme le créole, fortement marquée par son oralité et équipée depuis assez peu de temps, mais aussi parce que le français (dans l'Hexagone en tout cas) n'est pas menacé par une autre langue et ne partage pas son écosystème avec une autre langue alors que le créole, lui, a toujours vécu sous l'aile par trop protectrice (: étouffante) du français. Les stratégies traductives devront donc être très différentes selon qu'on se trouve en milieu monoglossique ou en milieu diglossique. Il s'agit là d'une réflexion encore nouvelle dans le monde de la créolistique mais qui commence à s'affirmer (cf. les articles de M-C. Hazaël-Massieux, R. Confiant, J-P. Arsaye, C. Gendrey etc…).

L'une des idées-fortes qui émane de cette réflexion est que la traduction possède un pouvoir de transformation de la langue, égal, voire supérieur à celui de la littérature. En effet, si l'on prend l'exemple d'un romancier créolophone, même s'il s'efforce de travailler la langue, de la remodeler et de lui imprimer sa marque, il n'en demeure pas moins à l'intérieur d'un univers culturel familier au créole: cela se voit dans «Dézafi» (1975), le premier roman en créole haïtien écrit par Frankétienne.

Tandis qu'au contraire, le traducteur créolophone est obligé de dépayser la langue, de la sortir de son univers créole pour l'amener vers un univers complètement étranger, univers habité de réalités matérielles ou abstraites complètement inconnues. Ce faisant, non seulement le traducteur participe au processus d'accession du créole à l'écriture mais il enrichit également la langue de points de vue, de perspectives ou d'horizons qui jusque là paraissaient inatteignables. En traduisant la Bible en allemand, Luther a non seulement créé un allemand littéraire mais il a permis à cette langue d'accéder à la dimension du sacré. Il ne faut jamais, en effet, séparer la dimension linguistique de la traduction de sa dimension culturelle.

Nous avons dit plus haut qu'il existait une certaine tradition traductive en créole, mais il importe de souligner que celle-ci a surtout concerné des genres proches de l'oralité comme la fable, le récit biblique ou le théâtre (cf. F. Morisseau-Leroy ou G. Mauvois traduisant en créole l' «Antigone» de Sophocle). Il importe aujourd'hui de s'attaquer à des genre marqués par une logique de l'écriture plus forte: nouvelle, roman, essai etc… C'est ce que j'ai fait pour le «Cahier d'un retour au pays natal» d'Aimé Césaire dont la traduction est publiée en annexe de mon livre «Aimé Césaire – Une traversée paradoxale du siècle» (1992). C'est ce qu'a fait aussi Jean-Pierre Arsaye en traduisant «Une partie de campagne» de Maupassant en 2002. Aujourd'hui, je soumets à l'appréciation des internautes une traduction du roman de Gustave Flaubert, «Un cœur simple», avant de la publier sous forme-papier. Il s'agit d'un exercice délicat quand on connaît le souci que Flaubert apportait au style. Tout un chacun connaît son fameux «gueuloir», pièce dans laquelle il prononçait à haute voix les phrases qu'il venait d'écrire pour voir si elles sonnaient bien.

La traduction créole d' «Un cœur simple» est accompagnée du texte original français. Ce que j'attends de vous ce sont des critiques et des propositions de retraduction, chose que vous pourrez faire en cliquant sur la rubrique «Dialogue avec les internautes».

Raphaël CONFIANT

5

16.6.2004

Je suis traductrice littéraire. Je traduis parfois des ouvrages d'auteurs francophones des caraïbes en Anglais.

J'ai rencontré ce dictionnaire avec joie, car il sera d'un grand secours lors de ces traductions où l'on trouve souvent des mots ou des expressions créoles.

Néanmoins, en ce qui concerne justement des expressions créoles je me demandais si je pouvais vous écrire de temps en temps pour trouver des explications. Par exemple, aujourd'hui je dois traduire cette phrase :  "Langues de cabris, les sages disaient qu'elle s'en repartirait comme elle était venue."

On pourrait penser que " langue de cabris " voudrait dire que ces personnes agées ont, comme on dit en France, "la langue bien pendue" -- qu'elles parlent excessivement, leurs langues sautent d'un sujet à un autre sans encombre. Mais comment être sur? Pouvez-vous m'aider?

C. Dickson

p

Votre question, fort intéressante, sur l'expression "langue de cabris" et l'interprétation erronée que vous en donnez prouve une fois de plus que la traduction ne relève pas de la seule linguistique comme le croient trop souvent un certain nombre de fanatiques de la secte "Linguistique-Première science humaine vraiment scientifique".

La traduction a, en effet, partie liée avec l'histoire, l'anthropologie, la psychologie, la littérature, la philosophie et j'en passe. Celle que nous pratiquons à l'école ou à l'université n'a que peu de rapports avec la traduction réelle car elle n'a qu'un seul objectif : aider à l'apprentissage des langues étrangères. D'où les exercices de "thème" et de "version" ! Notez déjà que le "thème" (traduire de sa langue maternelle vers une langue étrangère) n'existe pas dans la réalité. Aucun Français ou Francophone ne serait assez fou ou assez prétentieux pour pouvoir prétendre traduire Balzac en anglais ou en allemand. Pas plus qu'un Anglais ne se hasarderait à traduire Joyce en français ou un Allemand Goethe en italien. Bon, il peut exister des cas rarissimes de bilingues parfaits ou de bilingues de naissance mais même dans ce cas, être bilingue ne signifie pas qu'on est forcément un bon traducteur puisque justement la traduction ne relève pas de la seule linguistique.

L'expression "langue de cabri" est un calque du créole "lang kabrit". On dit ainsi de quelqu'un : "Boug-tala ni lang kabrit", ce qui littéralement signifie "Cet homme a une langue de cabri", expression parfaitement obscure quand on ne connaît pas le contexte anthropo-historique créole.

En fait, cette expression veut dire "Cet homme a une langue aussi prophétique que celle du cabri". Rien à voir donc avec, comme vous le pensiez, le fait de parler beaucoup ou de parler avec sagesse. Pourquoi donc la langue du cabri serait-elle plus prophétique que celle du mouton, du cheval ou du chien?

Ici, il faut se référer au bestiaire créole et aux significations attachées aux cris des animaux. En Europe, on sait bien que le hululement de la chouette annonce quelque malheur. De même que lorsqu'un chien se met à aboyer en gémissant.

Eh bien, dans le monde créole, le cabri est un animal réputé maléfique dans certaines circonstances, ou plus exactement lié à certaines forces invisibles. On le croit capable de prédire l'avenir. En bien ou en mal d'ailleurs. Contrairement donc au hululement de la chouette ou à l'aboiement-gémissement du chien, le cri du cabri peut annoncer soit une bonne nouvelle soit une mauvaise nouvelle. Il n'annonce pas systématiquement une mauvaise nouvelle. Tout dépend du "co-texte" (de l'environnement textuel) de la phrase que vous avez à traduire. L'extrait que vous me présentez est beaucoup trop court pour que je puisse en juger.

Bien sûr que vous pourrez me solliciter quand vous le voulez ! Mais je n'ai pas la science infuse et d'autres internautes peuvent participer au débat. La mise sur Internet de ma traduction du roman de Flaubert vise justement à cela : susciter un intérêt pour l'activité traduisante en milieu créole. La traduction, plus que la littérature, est, à mon avis, un enjeu vital pour la langue créole.

Autre chose : il y a un réel problème de traduction des oeuvres caribéennes. Pourquoi ? Parce qu'en général, les traducteurs, le plus souvent euro-américains, ne connaissent pas le contexte caribéen. C'est comme ça que "Solibo Magnifique" de Patrick Chamoiseau se retrouve traduit en...anglais d'Oxford ou en espagnol castillan. Une vraie aberration !

Un exemple précis : la traduction du terme "Mulato" de l'espagnol caribéen vers le français. Les traducteurs le rendent mécaniquement par "Mulâtre", ce qui est une erreur grossière car "Mulato" signifie "métis de Noir et de Blanc proche du Noir" tandis que "Mulâtre" signifie "métis de Noir et de Blanc proche du Blanc". C'est que les relations raciales et le système pigmentocratique hispanique et français sont très différents. Ainsi traduire "Mulato" par "Mulâtre" provoque une incompréhension chez le lecteur francophone antillais puisque dans son esprit, "Mulâtre" veut dire "métis très proche du Blanc" alors que "Mulato", dans le texte espagnol, voulait dire "métis très proche du Noir".

C'est ainsi que dans les années 80, un auteur colombien, dont j'ai oublié le nom, fut présenté comme le fondateur de la "Négritude colombienne". Le titre de son bouquin était : "Yo soy Mulato !", autrement dit, en français standard, "Moi, Mulâtre !". C'est d'ailleurs avec ce titre que fut publié son livre.

Vous vous imaginez bien que nous autres, francophones caribéens, cette traduction nous a laissés pantois ! Nous étions partagés entre la perplexité, l'incompréhension et le fou rire. Pourquoi ? Parce qu'il est inimaginable, en contexte franco-créole, que quelqu'un qui se présente comme un promoteur de la Négritude écrive un livre s'appelant "Moi, Mulâtre !". Toute notre histoire est celle de la lutte des Blancs créoles, des Mulâtres et des Nègres. On a d'ailleurs l'exemple frappant (et tragique) d'Haïti, où Mulâtres et Nègres s'affrontent depuis 2 bons siècles, depuis l'indépendance du pays en 1804.

Et je ne parle même pas de ces traducteurs qui rendent l'expression "Negrita mia" par "Ma petite négresse" ! En espagnol caribéen, elle signifie..."Ma petite chérie". En effet, un Blanc cubain peut parfaitement dire à sa femme, également blanche, "Négrita mia !"...

A vous lire bientôt donc !

Raphaël CONFIANT

4

1.6.2004

Bonjour M. Confiant

Je m'intéresse de près à la traduction depuis plusieurs années en particulier des auteurs caribéens anglophones en français, en tant que fille d'anglophones et de francophones de la Caraïbe. Il est vrai que je n'avais pas vraiment réfléchi ou plutôt osé réfléchir à ce que la traduction de textes des "grandes langues" vers les "petites langues" (par la force des choses et du pouvoir, bien entendu) pouvait apporter à celle-ci. Par mes lectures précédentes et en lisant des extraits de votre texte, il me vient plusieurs interrogations:

  • Que jugez-vous le plus important: que l'auteur puisse se croire aux Antilles parce qu'il lise du créole ou qu'il lise du Flaubert en créole? Beaucoup de traducteurs pensent qu'il faut écrire un texte à la portée du public visé. Par exemple, se suicider en s'ouvrant le ventre avec un sabre et non pas se faire harakiri. J'ai toujours trouvé cela regrettable, mais je voudrais votre point de vue.
     
  • Quels procédés de création lexicale utilisez-vous?
     
  • Comment vous y êtes vous prit pour traduire les métaphores?
     
  • Comme vous le dîtes, la poétique du texte est très importante. Est-il toujours facile de ne pas la sacrifier au sens, bien qu'une image peut être parfois plus parlante qu'une addition de mots choisis pour la sémantique.

Je n'ai pas encore lu votre texte dans son intégralité, mais j'espère pouvoir vous poser d'autres questions très bientôt.

Merci

Fabienne

p

En traduisant Flaubert en créole, je n'ai absolument pas voulu que le lecteur antillais se sente aux Antilles, comme vous dîtes. Ce roman se déroule dans le Nord-Ouest de la France et c'est justement un grand défi pour le créole que de démontrer qu'il peut exprimer des réalités qui lui sont complètement étrangères.

Quand vous lisez une traduction en français de Faulkner ou de Garcia Mazrquez, le traducteur ne cherche pas à vous faire sentir que vous êtes dans un univers français. Au contraire, il essaie, autant que faire se peut, de transcrire l'atmosphère du Mississipi ou de la Colombie.

Mais je comprends ce qu'il y a derrière votre question : est-ce que le fait de traduire Flaubert en créole ne créolise pas son roman ? Vous posez là la question de la "traduisibilité". Est-ce qu'on peut traduire d'une langue à l'autre sans qu'il y ait déperdition ?

En général, la plupart des traductologues s'accordent à dire qu'il y a une relative déperdition laquelle dépend de multiples facteurs :

  •  de la proximité linguistique des langues concernées : la perte sera moins grande du français à l'italien que du français au chinois.
  •  du texte à traduire : la perte sera plus forte dans un texte littéraire que dans un texte scientifique.
  •   de la qualité du traducteur : tous les traducteurs ne se valent pas, loin de là ! Et s'il y a des écoles d'interprétation (traduction orale), il n'existe malheureusement pas d'écoles de traduction, même si celle-ci est pratiquée de façon marginale, à l'Université etc...

Donc, oui, forcément, entre "UN COEUR SIMPLE" et "AN TJE SAN GANM", il y a une déperdition mais c'est normal. Il y en a aussi une quand ce même texte est traduit en anglais, en russe ou en chinois.

Venons-en maintenant à la nature de cette déperdition et là, j'essaierai de répondre en même temps à deux de vos questions à savoir comment je fabrique mes néologismes et celle qui concerne "harakiri".

En créole, langue massivement orale même si elle a été sporadiquement écrite dès le milieu du 18è siècle, se pose la question de la langue écrite et dans ce cas précis de la langue littéraire. Il est évident qu'elle n'est pas donnée comme c'est le cas de l'anglais, du russe ou du chinois. Cette langue littéraire créole est en pleine construction et justement, à côté des écrivains, les traducteurs portent leur pierre à celle-ci.

C'est dire que traduire en créole est plus difficile que de traduire dans une langue disposant déjà d'un niveau littéraire bien constitué! Le traducteur créolophone doit en fait se faire tout à la fois bâtisseur de langage et traducteur. Bâtisseur de langage parce qu'il est obligé de créer des mots ou des expressions pour rendre des réalités étrangères à l'univers créole et traducteur parce qu'il doit rendre la "forme-sens" (Henri Meschonnic) du texte qu'il traduit.

Pour la formation des néologismes, je vous renvoie à mon Dictionnaire des néologismes créoles chez Ibis Rouge. Pour la traduction proprement dite, je vous renvoie aux travaux des éminents traductologues que sont Jean-René Ladmiral, Antoine Berman, Georges Steiner, Henri Meschonnic, Eugene Nida etc...

Bien à vous.

Raphaël Confiant

3

1.6.2004

Bonjour,

Je viens de prendre connaissance du site Kapes Kreyol grâce à mon amie Maxette.

En tant que traductrice et enseignante de francais langue étrangère et seconde, je tiens à vous exprimer tous mes encouragements pour votre engagement à faire vivre les langues créoles et à leur donner toutes leurs lettres de noblesse.

Bravo et continuez!

Odile de Stockholm

p

La traduction est incontestablement un moyen pour les langues de s'enrichir mutuellement. Surtout les "petites", celles auxquelles l'Histoire n'a accordé aucune chance comme le créole, le berbère ou le basque.

En se frottant, par la traduction, aux œuvres classiques des "grandes langues", elles ne peuvent qu'élargir leurs possibilités expressives. Mais cela, vous le savez, puisque vous êtes traductrice.

Amitiés.

 Raphaël Confiant

2

28.5.2004

Yeps Alfaboug,

Toukon nou ka fè an tradiktoliji anglé, an té ka éséyé dé ti `"manipilasion" alantou a on débi-d-fraz a tradiksion a Flobè a'w la,
sé toutodébi, déziem paragraf. The langue de départ must be "Pour pas plus de cent francs par an".

An anglé tradiksion sé 'narghilé' an mwen. Nou ka pran on ti bout fraz é nou ka touné viré'y, éséyé konprann chak posibilité ka vin an lespri an nou é konparé é glozé a chak fwa asou sa ka pasé an tet a lokitè-la, jislé nou touvé lakeles ki ka kolé mié asou sans a orijinal-la, é si i pa toutafè satifèzan nou ka di sa osi.

Sa entérésan, fok nou lansé on lis diskision-é-éséyaj tradiksion. Mé sé pé ké lamenm-lamenm, piskè kon'w ja savé, mwen afon adan zafè konsew mizik endièn-la.

Ou ja a Sen-Malo intramuros? Pa bwè twop dlosiwo "lakay moun-an" !

A bientôt,
Jean Sahaï

PS : fout maké kréyol karu pli bel ki ta matnik ha-ha-ha !

Enki pou san fran pa lanné
Pou on ti san fran pa lanné
Pou on vié ti san fran pa lanné
Pou on piti ti san fran pa lanné
Pou on vié tou piti ti sanfran pa lanné

p

Comme tu le sais, une phrase n'a pas qu'une seule traduction mais elle n'a pas non plus une infinité de traductions. Le tout est de savoir quelles sont les traductions possibles en tenant compte de ce Mickael Riffaterre appelle le "cotexte" c'est-à-dire l'environnement textuel dans lequel la phrase à traduire est insérée. Il faut aussi tenir compte de la "poétique" du texte et dans bien des cas, une traduction grammaticalement correcte ne convient pas dans tel cotexte précis, la grammaire visant au respect des règles de la langue tandis que la poétique vise au contraire à la subversion de ces mêmes règles.

Dans tes propositions, celle qui me paraît le mieux convenir est "Pou on ti san fwan pa lanné". Par contre "Pou on vié piti san fwan pa lanné" me paraît relever de la "surtraduction", danger qui nous guette, tout particulièrement, nous, les Antillais, à cause de l'enseignement linguistique puriste que nous avons reçu à l'école: français classique, anglais de Londres, espagnol castillan etc...

D'accord pour ouvrir une réflexion traductologique multilingue mais pourquoi ne pas la faire à partir de cette traduction de Flaubert ? Tu pourrais nous dire, par exemple, ce qu'il en est de la traduction de "Un coeur simple" dans la langue de Shakespeare er de Wole Soyinka.

Plis fos, vié frè !

Afarel

1

27.5.2004

Flobè

Je pensais que Confiant était la reincarnation de Stendhal. En fait c'était Flaubert.

Eyadema

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Je ne crois pas à la réincarnation bien que je sois très sensible à l'hindouisme. D'autre part, je n'ai pas pour modèle unique les écrivains français contrairement à certains.

Je les admire et je les respecte mais, en cas de réincarnation, j'aurais mille fois préféré être réincarné en guerrier caraïbe gravant des roches au bord des rivières de nos îles.

Vous, savez, ces roches écrites qui nous parlent par-delà les exactions coloniales.

Salutations flauberto-stendhaliennes !

 

Viré monté