Ce sont eux-mêmes qui le disent, qui l’avouent: la télévision israélienne, ce 21 décembre 2009, vient de diffuser un reportage accablant sur les pratiques de prélèvement d’organes sur les cadavres des Palestiniens morts au combat. Dans la foulée, l’armée israélienne a bien été obligée de publier un communiqué reconnaissant les faits et l’un des principaux préleveurs d’organes, le Dr Yehuda Hiss, a avoué avoir pratiqué ce type d’opérations à maintes reprises.

Cette révélation n’a fait l’objet que d’une simple brève de l’AFP. Aucun grand média écrit ou audiovisuel français ne l’a reprise. On n’a entendu aucune des grandes âmes droits-de-l’hommistes du genre Finkielkraut, Henri-Lévy ou Glucksman s’émouvoir de ce qui relève non pas seulement de la profanation de cadavre, mais aussi et surtout du commerce illégal d’organes car lesdits organes prélevés illégalement sur les Palestiniens étaient destinés à être vendus et cela au prix fort!

Mais commençons par le commencement: ceux qui, les premiers, révélèrent cette pratique honteuse ne furent pas des Palestiniens, mais des…Suédois. Certes, les familles palestiniennes s’interrogeaient pour savoir pourquoi l’armée israélienne leur rendait les cadavres de leurs parents avec le ventre recousu de la gorge au nombril (parfois hâtivement recousu), pourquoi ces cadavres étaient toujours rendus de nuit, pourquoi il leur était donné une demi-journée pour les inhumer etc… etc… Et aussi pourquoi certains cadavres étaient carrément inhumés dans des tombes numérotées ne portant sans aucun nom et cela sans que leur famille aient la possibilité de les voir une dernière fois. Quand vous vivez dans un bantoustan, que chaque jour est un combat pour survivre, que des avions de chasse israéliens passent à longueur de journée sur l’étroit territoire où vous êtes parqués (350km2, soit le tiers de la superficie de la Martinique, pour 1,5 million d’habitants), que ce territoire est entièrement bouclé par air, mer et voie terrestre, vous n’avez pas le loisir de vous poser trop de questions.

REVELATIONS SUEDOISES

Alors, un journaliste suédois en poste dans la région, Daniel Boström, reporter au quotidien «Aftonbladet», se les a posées, lui! Il enquête, interroge une dizaine de familles palestiniennes, recense les noms des décédés dont les organes ont été prélevés et publie son article. La presse française en reprend des extraits sans faire de commentaires. Mais réaction immédiate du gouvernement israélien: il s’agit d’un article antisémite. Le premier ministre Netanhyahu s’écrie même: «Nous ne demandons pas des excuses au gouvernement suédois, nous voulons de sa part une condamnation de l’article!». On croit rêver? Il prend la Suède pour un pays vivant sous dictature, le Netanyahu, un pays où la presse est à la botte du pouvoir politique ou quoi? Depuis quand le gouvernement d’un pays dit démocratique serait-il responsable de tout ce qui s’écrit dans la presse du pays en question? Mieux: en Israël, une pétition demandant le boycott des meubles suédois Ikéa recueille des dizaines de milliers de signatures.

Mais c’est la grande presse occidentale qui fait preuve de l’ignominie la plus crasse: «Aftonbladet» n’apporte aucune preuve de ce qu’il décrit» clament en chœur les journaux français, britanniques et étasuniens. Aucun d’eux n’a l’idée de demander à l’un de leurs, pourtant nombreux, correspondants en Palestine de faire une contre-enquête, ne serait-ce que pour démontrer l’inanité des allégation du journal suédois. Aujourd’hui, ils ont l’air fin, tous ces journalistes à la noix! Aujourd’hui que la télé israélienne a apporté des preuves irréfutables de ces vols d’organes sur les Palestiniens et que Tsahal, l’armée israélienne, a reconnu les faits, nos journalistes occidentaux révèlent ce qu’ils sont: des salauds. Au sens sartrien du terme. Oui, Jean-Paul Sartre avait tout dit sur cette presse à bonne conscience et donneuse de leçons de droits de l’homme (blanc).  

HORREUR

Citons le témoignage d’une mère palestinienne et de son fils (19 ans) recueilli dans le village cisjordanien d’Imatten dont le jeune fils et frère Bilal Achmad Ghanem, soupçonné d’avoir été l’un des meneurs de la première Intifada, a été abattu par un commando de l’armée israélienne:

«Après l’avoir tué, les soldats israéliens ont transporté le corps de mon fils par hélicoptère en Israël. Ils me l’ont rendu quelques jours plus tard dans un grand sac noir. Il n’avait plus aucune dent et son corps avait été ouvert de la gorge jusqu’au ventre, puis très mal recousu…»        

Dans le même temps, la chaîne de télévision étasunienne CNN, enquêtant sur le trafic d’organes humains au niveau international, nous apprend, par la bouche du journaliste Scheper-Hughes, que «l’essentiel du trafic de reins dans le monde provient d’Israël». En anglais, ça donne ceci: «Israel is the top. It has tentacles reaching out worldwide.» (traduction: «Israël en est le sommet. Il étend ses tentacules à travers le monde entier.”). Là, grand silence en Israël et aucune réaction de Netanyahu!!! Difficile, il est vrai d’accuser le grand protecteur yankee, celui qui vous fournir des armes ultrasophistiquées, d’être antisémite.

Plus pire, si l’on peut dire, est la disparition pure et simple de cadavres de Palestiniens. Il y a ceux que l’ont rend recousus à la famille, ceux que l’on enterre avec juste un numéro sans rien dire à la famille et puis ceux, nombreux, dont personne n’entendra jamais plus parler. Où sont-ils? Qu’est-ce que Tsahal a fait de leurs corps? On frémit à l’idée du dépeçage que leurs corps ont dû subir lorsqu’on voit Tashal reconnaître en ce mois de décembre que oui, elle pratique le prélèvement clandestin d’organes.

Où sont passés les corps d’Imad et Adel Awad Allah assassinés à Ramallah, le 10 septembre 1998? Où sont les corps de Hani Ahmad Kharboush et Adel Mohammad Hadaiedeh, assassinés le 16 juin 2003 au nord de Tulkarem? Où est le corps de Hassan IUssa Abbas assassiné le 9 octobre 1994 à Jérusalem? Où est le corps de Salah Jalad Allah Salem assassiné le 14 octobre 2006 ? etc…etc…

Maintenant qu’Israël vient d’avouer, peut-être condescendra-t-il à dire aux familles ce que sont devenus les corps qu’il a charcuté…

Raphaël Confiant

 Viré monté