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Fleurs en terrain volcanique

Julienne Salvat

 

 

 

 

 

 

 

 

Fleurs en terrain volcanique, Julienne Salvat • L'Harmattan • ISBN 9782343041193 • Octobre 2014 • 150 pages • 15,50 €.

Au demeurant, été comme hiver, rien ne venait rompre l’enchantement de cet espace que calcine la surabondance solaire, que fraîchissent les clartés nocturnes, quand la lune nous rejoignait et s’attardait pour la plus grande magie des kabars, ou bien quand, nous faufilant à travers les chokas, nous parvenions à l’étroite crique brune qu’enserrent les rochers qui protègeraient une cérémonie.
                                     
Alors s’accomplissait leur métamorphose face à l’Océan, dans ces rituels qui puisaient aussi bien dans les poteries, les calebasses et paniers de la Caraïbe que dans les soubiques de Madagascar, dans les tentes et bertelles de Bourbon, créant la saveur nourricière de nos ailleurs mêlés. La lumière lunaire. Son huile diluvienne pleuvait sur leurs visages ainsi régénérés. Transfigurées, elles devenaient pour nous choéphores de l’avenir, porteuses de visions vivifiantes. Leurs robes blanches et fauves bougeaient en vagues drapées, leurs bracelets et leurs anneaux luisaient, tantôt armes de guerre, tantôt armes de paix.

Julienne Salvat est née à la Martinique et réside à l’île de la Réunion où elle a mené sa carrière de professeur de Lettres, des activités de théâtre et d’animation culturelle.

Elle est membre de la SDGL et de la Société des Poètes Français. Auteur de fiction romanesque et poète, elle est également publiée dans diverses revues et des recueils collectifs.

Photo F. Palli

Extrait

«– Le passionnant dans tout ça, c’est que chaque individu de même que l’artiste demeure souverain dans ses choix, peut introduire sa part insolite, défoncer les barrières de la langue, ruer dans les brancards de vendettas dont il n’a cure, mettre à bas le lourd fardeau des interdits qu’on veut lui imposer. Il peut défier tout cela, il le doit. Bref, son autonomie singulière renforcera et l’équilibre du tout et la contrariété des parties.

– Moi, je pense à l’exemple de la musique, ses gésines multicolores…

– C’est pourquoi être métis, c’est aussi vivre et se vivre tantôt de violences et de sérénité, tantôt d’harmonie et de criardes dissonances. 

– Le métis n’en est pas moins un monstre signifiant pour légende future comme on en trouve dans la fable antique. Nés d’accouplements réprouvés, ils n’en sont pas moins des mythes, des figures sacrées dont les Grecs nous ont légué une profusion de modèles.» (p.79)

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«Impériale et simple, elle dit la poésie de l’Océan Indien créole. Elle dit Gamaleya, le démiurge de l’aïeul Marron mythique, Albany et Lorraine, tous deux pleurant leur exil mais fascinés par le grand pays dehors, Azéma le réprouvé et ses stigmates, errant au cœur de la pampa argentine. Elle dit Malcolm de Chazal le Voyant de l’île Maurice, et tous les autres. Chevauchée par Kalla aux deux visages d’esclave et de bourrelle, elle était tour à tour Célimène, Muse des Trois-Bassins et jument anoblie, Héva la reine des marronnes elle aussi lui pressait le flanc.» (p.125)

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