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Le spectacle «Haïbécoise» de Rebecca Jean confirme
son talent sur la scène musicale montréalaise

Robert Berrouët-Oriol

Montréal, le 1er novembre 2021

Peu de temps après s’être produite au Centro Leonardo Da Vinci, à Montréal, dans le cadre des célébrations du mois du créole, la chanteuse Rebecca Jean a offert au public montréalais, le 30 octobre 2021, son nouveau spectacle musical intitulé «Haïbécoise» au lieudit Le Ministère. La tonalité sinon l’ADN de ce spectacle est inscrite dans le titre même de cette ample prestation musicale, «Haïbécoise», comme pour rappeler les deux matrices de l’identité de cette chanteuse haïtiano-québécoise, née à Montréal de parents haïtiens, et qui chante aussi bien en français qu’en créole. «Haïbécoise» est un mot-valise créé par Rebecca Jean pour signifier que c’est à la confluence et à la pollinisation de ses deux cultures, la québécoise et l’haïtienne, qu’elle tisse son art chansonnier et qu’elle inscrit en notes aériennes chacune des mélodies qu’elle a écrites ou qu’elle interprète, avec un rare et novateur talent déjà salué dans les médias québécois par la critique. En entrevue au National le mois dernier, elle rappelle que «[Ses] racines ont pris naissance au soleil, quelque part entre Petit-Goâve et Jacmel. Mes branches ont poussé et parcouru la terre, puis j’ai vu le jour sous un ciel d’hiver. Dans mon cœur deux histoires se font la cour ! Je vis au rythme des cuillères et des tambours. J’ai un héritage aux saveurs métissées, une fierté qui s’étend de Kafou à Gaspé.» (Extrait d’«Haïbécoise»; voir aussi l’article «Rebecca Jean, la haute voix de la musique contemporaine haïtienne au Québec», par Robert Berrouët-Oriol, Le National, 10 septembre 2021.) Et lorsqu’elle fait quelques rares incursions en anglais (par exemple dans son disque «Vortex»), un internaute, sur les réseaux sociaux, soutient que la chanteuse haïtiano-québécoise fait penser à Beyoncé chantant l’époustouflant «Dangerously in Love». Toujours sur les réseaux sociaux, un autre internaute, emballé en septembre dernier par la chanson «Gen de jou» --inventive adaptation créole de «Hier encore» de Charles Aznavour figurant dans l’album collectif «Amoureuses des mots»--, situe Rebecca Jean dans la lignée de la grande Toto Bissainthe interprétant comme en écho à Léo Ferré l’inoubliable «Haïti, mon pays»…

Un spectacle polyphonique, convivial et solaire

Il a duré plus d’une heure, le spectacle musical de Rebecca Jean: un moment d’une très grande intensité, un ravissement pour les oreilles et les yeux dans la géométrie des sens interpellés, qui confère le sentiment d’assister au déploiement de quelque chose d’unique sur le registre d’une chorégraphie alliant le ballet vocal aux sonorités finement hachurées de la guitare et aux convulsions savantes et ordonnées des différents tambours. Installée au piano qu’elle joue avec brio tantôt avec douceur tantôt avec le débit d’un volcan de notes harmonieuses, accompagnée de ses deux musiciens --Moïse Yawo Matey, talentueux percussionniste d’origine Togolaise «qui fait parler les tambours», et Assane Seck, guitariste d'origine sénégalaise dont l’exemplaire virtuosité n’est pas sans rappeler le «Havana Moon» de Carlos Santana--, Rebecca Jean a débuté son spectacle par une déambulation-évocation quasiment murmurée au rythme somptueux, souple et lent d’un Yanvalou méditatif intitulé «Papa Bondye». La chanteuse est apparue sur scène vêtue d’une sorte de tunique de couleur bistre-mordoré qu’elle a elle-même dessinée et qui a été confectionnée, comme toutes ses tenues de scène, par sa mère Honaise Simon sur une machine à coudre qui nous remet en mémoire la «Singer» d’autrefois, celle de Dianira Oriol, la mère du romancier René Depestre, à laquelle celui-ci rend hommage dans «Popa Singer» (Éditions Zulma, 2016). Également, en début et en fin de spectacle, Rebecca Jean a porté une couronne aux longues aiguilles tendues vers le ciel, sorte de rappel des rayons de soleil qui éclairent sa démarche de vie et sa quête de lumière à travers son projet musical.
 

Le spectacle musical «Haïbécoise», chaudement applaudi par le public, comprend des titres français et créoles agencés selon un dispositif scénique fluide où les morceaux français alternent avec les chansons en créole, tandis que l’une des chansons, très précisément «Haïbécoise», est bilingue français-créole. Parmi les titres interprétés figurent «Femme de la terre», «Amour lumière», «Pardon Gaia», «Lang lakay», ainsi que la chanson «Gen de jou» manifestement très attendue par le public. «Lang lakay», accessible sur YouTube, n’est pas une traduction mais plutôt une adaptation créole très librement inspirée de la célèbre chanson de Yves Duteil, «La langue de chez nous»: le texte a d’abord été écrit en créole et sa «version française» est destinée aux locuteurs francophones. Comme nous l’a précisé Rebecca Jean, «Lang lakay» est un hommage à la beauté de la langue créole et figure sur son album/EP «Haïbécoise». En voici des extraits:

«Lang lakay »

Idées ayant inspiré la version créole

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Yon lang ki pran nesans Une langue qui a vu le jour
Nan doulè, nan soufrans Dans la douleur et la souffrance
Sou bitasyon lanmò Sur le sol amer des plantations
Kreyolanm boujonnen Le créole a fleuri
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Kreyòl se yon pwomès Le créole, c’est une promesse
Youn fè lòt poun ekziste Que l’on s’est faite pour survivre
Chak grenn mo son fyète Chaque mot empreint de fierté
Raple n kiyès nou ye Nous rappelle qui nous sommes
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Lang manmanm son tanpèt La langue de ma mère est une tempête
K ap kraze, ka p brize Qui court pour tout casser
Sovaj kon toro bèf Sauvage comme un taureau
K ap fouke mawoule  Qui poursuit son maître

L’un des temps forts du spectacle de Rebecca Jean, qui arbore durant tout le décours de sa prestation un constant sourire ensoleillé, a été l’interprétation de la chanson «Gen de jou», sa fameuse traduction/adaptation créole de la chanson «Hier encore» de Charles Aznavour figurant dans l’album collectif «Amoureuses des mots», et cette chanson, pour l’album, a été enregistrée en studio avec l’apport des musiciens accompagnateurs. Une interprétation «en direct», «devant public», («live») est donc différente à plusieurs égards de celle réalisée en studio pour l’album collectif «Amoureuses des mots»: elle est portée par une forte énergie provenant sans doute du contact direct avec le public. Sur la scène du Ministère, l’interprétation «en direct» («live») de «Gen de jou», non formatée par les impératifs du studio d’enregistrement, a comme libéré la haute voilure chansonnière de cette remarquable adaptation créole, la mélodie s’est exposée avec plus de vitalité, la rythmique de la composition musicale a paru mieux harmonisée dans l’entrelacement de la guitare, des percussions et de la voix. Tantôt on a entendu les percussions et la guitare soutenir l’éclat modulé de la voix, tantôt l’on a écouté la voix, en ses cimes et ses respirs, guider l’accompagnement tambouriné et celui des accords de la guitare. Dans son surgissement éclaté mais admirablement maîtrisé, sur la scène du Ministère, la chanson «Gen de jou»  est une remarquable illustration des multiples potentialités de l’art chansonnier de Rebecca Jean en raison de son pouvoir polyphonique puissant et amplement attractif sur l’auditoire conquis au fil des mots et de la mélodie. Ainsi l’on comprend mieux, en écoutant l’artiste interpréter «Gen de jou» sur scène, ce que représente et signifie le cheminement créatif de cette adaptation du texte original de Charles Aznavour. En entrevue, elle le dévoile comme suit : «Lorsque mon éditeur Jehan Valiquet m’a dit qu’il voulait faire un album hommage à Aznavour mettant en lumière 14 voix féminines, j’ai tout de suite été emballée par l’idée. J’ai aimé que les chansons ne nous soient pas imposées : chaque participante pouvait y aller avec son coup de cœur et le résultat est merveilleux. Pendant quelques jours, je me suis plongée dans le répertoire d’Aznavour. Je me réveillais et je m’endormais avec sa musique. Puis, l’évidence de faire «Hier encore» m’est arrivée comme une révélation. Le thème universel de la nostalgie liée au temps qui passe m’a interpelée. J’ai d’abord entendu la rythmique comme un tambour dans ma tête. Je me suis installée au piano et je me suis réapproprié les accords du texte d’Aznavour en y ajoutant une couleur «rasin». À ce moment, mon cœur a vibré. Je ne savais pas encore ce que j’allais raconter, mais il fallait que ce soit en créole. Pendant deux jours, j’ai été dans un état extatique en découvrant les mots qui s’enchaînaient pour exprimer ce que la chanson originale m’avait fait ressentir. Au lieu d’essayer de faire une traduction mot pour mot, j’ai plutôt tenté de ressentir l’essence du texte d’Aznavour pour ensuite traduire cette essence dans mes mots, avec des expressions intrinsèques à la culture haïtienne et au créole.» («Rebecca Jean, la haute voix de la musique contemporaine haïtienne au Québec», par Robert Berrouët-Oriol, Le National, 10 septembre 2021.)

À l’instar de plusieurs autres créations/adaptations créoles de Rebecca Jean, «Gen de jou» signe un exemplaire rapport à la langue –au français avec l’harmonisation de «Lang lakay», qui est une adaptation créole librement inspirée des idées de la célèbre chanson de Yves Duteil, «La langue de chez nous». Un novateur rapport, également, à la langue créole chez Rebecca Jean au creux d’une conception originale du langage comme espace d’exploration des possibles de la langue –possibles harmoniques, métaphoriques, mémoriels: la langue, qui ne se limite pas à sa fonction première de communication mais qui, telle une terre-glaise, se laisse pétrir et architecturer pour ouvrir au sens dans sa dimension musicale et faire jonction avec des harmoniques qui interpellent les sens. Cela s’est donné à écouter samedi soir sur la scène du Ministère; cela s’expose bellement dans la trame narrative de «Gen de jou» qui se lit comme suit:

«Gen de jou, m santi kè m lou
M rete m ap kalkile jan ane yo pase
Anvan w bat je w, se vre… 20 tan gen tan koule
Tankon w zeklè, tankou premye fwa w damou
M te gen anpil pwojè, anpil rèv ki peri
Van pote yo ale, li pran yo san mande
Se lè m rete m vin wè, tout lespwa m antere
Tan kouri kou lapli ka p desann yon mòn debwaze
Yè maten, sa pa twò lwen…
M ta p gagote lavi m san m pa menm reflechi
Nan twòp pale anpil, bay tan m pou granmèsi
M pa t panse lajenès ta prale san tounen
M chita m ap bwè plezi san m pa janm mezire
E menm lè mwen tonbe, m te ka rekoumanse
Men kounye a m wè lavni pi kout ke le pase
M pa konn pou konbyen jou anvan lannwit tonbe
Gen de jou, m santi kè m lou
Lè m konte tout zanmi m ki gentan janbe
Lè m panse ak fanmi m ki fin degrennen
Sa fè m reyalize talè konsa se tou pa m tou
Tan pa bezwen konnen si w pòv, si w gen lajan
Menm si w ta vle kenbe l, li gen yon sèl direksyon
Msye pa gen pitie, kanmenm l ap vin prije w
Ou mèt sote, ponpe… Granmoun nan ap antre
Men anvan male, pou ti tan sa k rete
M vle selebre lavi, toutotanm ka kanpe
M vle pataje listwa m
Pou nou pa bliye m te egzizte»

(Rebecca Jean, «Gen de jou», adaptation créole de «Hier encore» de Charles Aznavour.) 

Comment, dans les plissures du spectacle musical «Haïbécoise», qualifier la voix de Rebecca Jean ? S’il est vrai que des observateurs de son parcours artistique ont parlé de «douceur», de «puissance» et l’ont parfois qualifiée de «rauque», ce que nous avons attentivement écouté samedi soir invite à élargir la palette qualificative de la voix de l’artiste. En ses différents registres, sa voix se singularise et se caractérise, d’une chanson à l’autre, d’un registre à l’autre, comme une voix à la fois (a) sépulcrale: parfois voix grave mais surtout vibrante qui semble venir des tréfonds de l’âme; (b) chaude: voix douce, prenante et attirante, qui procure une sensation de bien-être, très agréable à entendre; (c) cristalline: voix claire, sans défaut, harmonieuse ou mélodieuse à souhait; (d) modulée: voix contrôlée, suivant un rythme agréable à entendre. C’est en cela également que l’artiste séduit et emporte l’adhésion de son public: ses nombreux applaudissements en témoignent avec chaleur. Ce sont ces potentialités de sa voix qui font liant avec les rythmes dont elle sertit ses chansons par l’appel au konpa, au reggae, à la soul, au zouk, à la chanson québécoise et française et parfois au jazz, ces rythmes habitant un imaginaire créatif qu’elle met en «partition sonore» à l’aune d’un professionnalisme rigoureux et reconnu dans la profession musicale québécoise.

Rebecca Jean a eu l’heureuse idée d’ajouter au spectacle «Haïbécoise» une «touche de magie supplémentaire avec Véronique Dion, artiste peintre et André Fouad, poète», excellent diseur également reconnu pour la grande qualité de sa poésie en langue créole. En début de spectacle, il a magnifiquement interprété le texte de Wooly Saint-Louis Jean, «Renaissance», tiré de leur album «Mélodie des mots II» paru en Haïti en 2021. Au cours du spectacle, Véronique Dion, inspirée par la musique de Rebecca Jean, a composé sur le tas un tableau inédit figurant une femme arborant une parure «afro» et côtoyant la Fleur de Lys du Québec ainsi que la mémoire scriptée des Autochtones, toile qu’elle pourrait sans doute un jour intituler «Confluences Québec-Haïti».

Le dernier morceau interprété par Rebecca Jean est une chanson de Manno Charlemagne, «Manman», hommage à la mère qui donne la vie et introduit ainsi son enfant à la lumière, hommage également aux mères qui portent sur leurs épaules combattantes «L’autre moitié du ciel» (titre du recueil de nouvelles de Sara Doke paru en 2013 chez Élytis). Car il y a chez Rebecca Jean un positionnement citoyen féministe sereinement assumé puisque, selon elle, «un artiste doit toujours porter une cause» (entrevue à Ayibopost, 26 février 2021). Ce positionnement citoyen féministe s’expose dans plusieurs de ses chansons, notamment dans «Femme de la terre» qui a elle aussi été chaudement accueillie par le public. «Haïbécoise» est un spectacle très professionnel, dont se souviendra longtemps un public conquis, une prestation musicale de haute qualité qui confirme, sur la scène musicale montréalaise, les extraordinaires talents de Rebecca Jean musicienne, auteure, compositrice et interprète.

L’inscription de Rebecca Jean dans l’espace musical du Québec doit être située dans un cadre plus large pour mieux en apprécier la portée. Depuis une cinquantaine d’années, le tissu démographique du Québec est irrigué par l’apport d’une centaine de communautés culturelles dont les locuteurs proviennent de pays aussi différents que la Jamaïque, le Chili, Haïti, le Maroc, etc. Ces communautés culturelles contribuent à enrichir le Québec dans divers domaines allant de la gastronomie à la peinture, de la littérature à l’éducation. En raison des liens historiques anciens entre le Québec et Haïti --voir l’article de Lyonel Icart, «Haïti-en-Québec / Notes pour une histoire», revue Ethnologies, volume 28, numéro 1, 2006--, l’apport des 150 000 migrants haïtiens à la modernisation du Québec s’est manifesté dans des domaines aussi variés que la peinture (Lionel Laurenceau, Marie-Denise Douyon, Manuel Mathieu); la santé (Dr Jean-Claude Fouron, Dr Emerson Douyon, Dr Yvette Bonny, Dr Carlo Sterlin, Dr Joël Des Rosiers); le sport (Bruny Surin); l’éducation (Georges Anglade, Cary Hector, Hérard Jadotte, Nathan Ménard, Claude Moïse, Émile Ollivier, Maximilien Laroche, Samuel Pierre, Jean-Claude Icart, Jean-Marie Bourjolly); la littérature (Anthony Phelps, Serge Legagneur, Franck Fouché, Joël Des Rosiers, Émile Ollivier, Gérard Étienne, Stanley Péan, Alix Renaud, Dany Laferrière, Frantz Benjamin, Lenous Surpris, Jan J. Dominique, Roger Edmond, Rodney Saint-Éloi, Marie-Célie Agnant, Robert Berrouët-Oriol auteur de la première étude théorique sur les «Écritures migrantes au Québec»). Samuel Pierre, enseignant à l’École polytechnique de Montréal, en dresse un exemplaire et fort éclairant tableau dans le livre collectif de référence «Ces Québécois venus d’ailleurs – Contribution de la communauté haïtienne à l’édification du Québec moderne», Presses internationales Polytechnique, 2007. Dans le domaine de la chanson, le Québec a vu s’exprimer des pionniers (Georges Thurston alias Boule noire, Guy Durosier), puis Luck Mervil, Marc Yves Volcy, Régine Chassagne du groupe Arcade Fire, Marie-José Lord, etc.  La musique savante haïtienne s’est également invitée dans le paysage musical québécois sous l’impulsion, il y a une quarantaine d’années, de l’ethnomusicologue Claude Dauphin, fondateur de la SRDMH (la Société de recherche et de diffusion de la musique haïtienne). Quant aux arts de la scène au Québec, on retiendra, entre autres, les contributions de premier plan d’Anthony Kavanagh, humoriste, chanteur, comédien et vedette confirmée tant au Québec qu’en France et en Europe; Eddy Toussaint, qui a fondé dans les années 1972 avec Eva Von Genscy et Geneviève Sabaing «Les ballets jazz de Montréal», puis en 1974, la compagnie «Les ballets Eddy Toussaint de Montréal» et «L’école Eddy Toussaint». D’autres artistes continuent d’irriguer l’espace culturel du Québec, notamment le guitariste de jazz Harold Faustin, le bassiste, vibraphoniste et percussionniste Éval Manigat, le pianiste Eddy Prophète, le comédien et metteur en scène Fayolle Jean et la jeune chanteuse de jazz Rachel Jeanty. C’est donc dans ce riche et novateur contexte culturel québécois que Rebecca Jean tisse, de sa voix puissante et singulière, sa partition musicale polyphonique et bilingue français-créole.

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Viré monté