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Le divo-musicien Azor:
un météore sous une pluie de tambours

Par Dominique Batraville

 

Azor

Azor, Azor hélas, est parti le 16 juillet 2011, en pleines festivités mariales et vodoues, à Ville-Bonheur-Saut-d’Eau, quand résonnaient encore les échos d’un  lieu livré à la voix de ce musicien sacré: Lénord Fortuné de son vrai nom.

Malade et affaibli, Azor avait  toujours tenu bon. Sa discipline, son courage, sa ferveur et sa consécration aux mystères invisibles de l’Afrique immatérielle l’ont poussé  à produire une discographie phénoménale.

Tout n’a pas été rose dans la vie de Lénord Fortuné. Ne cherchant qu’à  interpréter les tambours et qu’à conjuguer la voix des secrets  révérés du vodou, le musicien et fondateur du groupe Racine Mapou a forcé  ses vocalises jusqu’aux sphères des cosmogonies ancestrales.

La popularité d'Azor découle d’une chanson inscrite dans l’engagement social: «Vwazen an di m se vagabon pou mal pouse bourèt ala m 'konnen travay se libete mwen pa p mande.»

Les actes d’Azor (voix, tambour, spectacle) vont se répercuter des milliers d’années encore, comme les cris des apôtres entendus dans l’Apocalypse de Saint-Jean.

Azor nous a appris l’humanisme,  la raison et le futur des mondes à venir. Tant par sa modestie. Tant par son exubérance maîtrisée.

Il y  aura toujours Ram, Racine Kanga, Boukman Eksperians et des solistes hors-normes comme Martha Jean-Claude, indépassable chanteuse de vodou/santeria. Azor, lui, aura été toujours  à la hauteur des événements sacrés. Sa spiritualité et son apesanteur  à Ville-Bonheur- Saut-d’Eau, le 16 juillet dernier, en attestent!

La musique telle que vécue  par Azor n’a rien d’une clé passe-partout ni d’une allumette pour réveiller les bougies éteintes. Avec Azor, on peut tâtonner au départ, mais à l’arrivée, on peut frôler des gravitations (célestes).

Il n’a jamais été facile d’exceller de ses mains et de sa voix. Avant Azor, il y a eu le roi de la musique pop, Michael Jackson, qui a imposé son rythme personnel à sa propre voix, ponctuée de gestes, de signes.

Azor a enduré maintes tortures dans la piété recommandée par le vodou. Après Dessalines, le fondateur de la patrie, après Jeanne Pelée, la prêtresse immortelle, un divo doit pouvoir entrer dans le miracle perpétuel, ici par les musiques sacrées made in Haïti.

Comme l’a écrit André Malraux, «Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut une vie.» Allez savoir pourquoi! Toussaint Louverture, Jacques Stéphen Alexis, Jacques Roumain resteront les flûtes irremplaçables des arbres musiciens. Et maintenant, Azor représente l’exemple de la renaissance d’une Haïti à venir!

Dominique Batraville

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