Bénézwel

Des Formes de Communication au service du pouvoir au
Venezuela, le cas de l’émission de télévision
«Aló Presidente» de Hugo Chávez

Claire Mahéo
Université de Rennes II
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Liza Rivera
Université de Paris IV
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Cordilliére des Andes
Vallée dans la Cordilliére des Andes. © P. Giraud

Cet article se propose d'éclairer sous une dimension historique et politique les fondements de la démagogie populiste du président Hugo Chávez, qui prennent appui entre autres formes de communication sur le médium télévisuel, en particulier son émission dominicale, «Aló Presidente».

Une analyse historique du système politique et de la construction du Venezuela est proposée en présentant les différents chefs de gouvernement qui se succédèrent au pouvoir de ce pays, révélateurs d'un système politique autoritaire historiquement lié à l'indépendance de ce pays et à ses conflits meurtriers, et sur lequel l'actuel président Hugo Chavez assoit son autorité et sa popularité.

En effet, si l'avènement de la démocratie en 1959 ne met pas fin à l'instabilité politique de ce pays, il favorise le développement des médias de masse. Créés et dirigés par de puissants groupes industriels, liés économiquement et culturellement aux Etats-Unis, et proches politiquement de l'oligarchie au pouvoir au Venezuela depuis les années 1960, les médias de masse et la télévision en tête, ont trop longtemps confondu liberté d'expression et libéralisme économique. Leur constante opposition à l'actuel président donne naissance à un paysage audiovisuel spécifique et atypique, avec d'un côté une télévision d'état récente et de l'autre des télévisions privées commerciales acquises à l'opposition ; toutes deux étant largement politisées et en dehors de tout consensus généralement propre à la déontologie et à la volonté d'indépendance des médias.

L'évolution chronologique de l'histoire politique et sociale du Venezuela amène à faire le portrait du président actuel de la démocratie bolivarienne du Venezuela. Cet article tentera de montrer comment le personnage de Hugo Chavez est représentatif d'un pays, et pourquoi son populisme teinté de marxisme fait recette auprès des couches populaires malgré la situation économique du pays. Nous nous attacherons ensuite à analyser comment cet homme, dont l'aisance et le charisme à la télévision font pâlir bien des professionnels, s'appuie sur ce médium pour servir ses intérêts et sa cause. Il ne s'agit pas là d'une forme classique de propagande, mais bien de la symbiose entre le pouvoir d'un individu et une forme médiatique populaire, qui trouve sa pleine expression dans l'émission « Aló Presidente », grande messe dominicale au cours de laquelle le président intervient sur divers sujets locaux et internationaux, en mélangeant allègrement références marxistes, symboles historiques, critiques enflammées à ses détracteurs, le tout dans un show télévisuel moderne qui lui permet de maintenir un contact direct avec sa majorité.

Avant de s'attarder sur cette émission télévisée, il est nécessaire de faire un rappel de l'histoire et de la construction sociale et politique spécifiques à ce pays, sans lesquelles le gouvernement actuel ne pourrait exister.

1. Histoire politique du Venezuela de l'indépendance à nos jours

Il est nécessaire de remonter assez loin dans l'histoire du Venezuela pour comprendre la complexité des tensions politiques et sociales qui secouent le pays aujourd'hui, et qui sont révélatrices du lourd héritage que représentent près de deux siècles d'instabilité politique mal cachée par le phénomène dictatorial militaire.

Au Venezuela, les luttes d'indépendance sont tout d'abord le théâtre d'un conflit entre l'oligarchie créole des hacendados et la haute bureaucratie d'origine espagnole. Cette même oligarchie s'affronte ensuite aux couches populaires.

L'ancienne structure sociale de la Nouvelle Andalousie1 est basée sur une stratification sociale très rigide, déterminée par la présence d'une population esclave très nombreuse, omniprésente sur toute la géographie vénézuélienne. Les Noirs sont au service de l'oligarchie des mantuanos, des riches aristocrates propriétaires fonciers, et des péninsulaires s'occupant du commerce. Sur le plan économique, le Venezuela jouit d'une économie de type mercantile, agricole et minière. Cette diversité économique produit ainsi des excédents destinés à l'exportation, ce qui favorise le contact des élites locales avec l'étranger. Les grandes différences ethniques à l'intérieur du pays empêchent l'intégration de la société dans son ensemble et la solidarité entre ses habitants. Ce problème d'intégration est très marqué au cours des luttes d'indépendance.

Les armées espagnoles, composées en majorité de llaneros pardos2 sous le commandement de José Tomás Boves, tentent ainsi d'exterminer les riches créoles vénézuéliens. Il ne s'agit pas seulement d'une guerre entre patriotes et monarchistes, entre espagnols et américains mais d'une lutte à mort entre des individus se haïssant pour des questions d'appartenance ethnique et sociale.

Par son charisme, Boves réussit à former une grande armée, et par sa stratégie, consistant à récompenser ses hommes en fonction de leurs efforts militaires, il crée une hiérarchie militaire où la mobilité sociale est possible. Les zambos, les mulatos3 ou les Noirs peuvent ainsi aspirer à un changement social grâce à leur implication dans la guerre contre les créoles. Dès le début de l'année 1814, après avoir reconquis et occupé Caracas, Boves se dirige vers l'Orient. Aussi bien du côté des patriotes que de celui des Espagnols, la guerre prend alors un caractère extrêmement violent. Les morts sont vengés, les populations suspectées d'avoir collaboré avec l'ennemi sont massacrées. Les actions militaires de Boves permettent enfin la prise de Caracas qui met fin à la première république vénézuélienne4.

Cette période affaiblit considérablement l'élite du Venezuela. La brutale chute démographique des mantuanos permet ainsi un certain changement social puisque l'élite créole ne reprendra plus les rênes du pouvoir sociopolitique qui reste entre les mains des militaires issus des guerres d'indépendance.

A la mort de Bolívar en 1830 et jusqu'au début du XXe siècle, l'histoire du Venezuela se caractérise par une série de guerres civiles, et jusqu'en 1958, le pays est gouverné par des chefs militaires, véritables caudillos qui utilisent l'armée pour se maintenir au pouvoir. Cette lutte permanente entre les différentes ethnies pour l'obtention et la conservation du pouvoir est une constante politique au Venezuela : les caudillos sang-mêlé utilisent leurs semblables appartenant aux couches populaires pour écarter l'élite vénézuélienne du pouvoir. Il s'agit d'un véritable désir de revanche sociale inscrit dans la conscience collective du peuple vénézuélien.

Ces hommes qui ont dirigé ce pays de l'Indépendance à nos jours, ont une origine sociale, une appartenance ethnique, une mentalité, des valeurs et des comportements qui ont favorisé la construction d'une société particulière5 au sein de l'Amérique latine. C'est cette même société qui va permettre l'élection démocratique de Hugo Chávez, dont la personnalité est pourtant à rattacher à cette longue filiation de chefs militaires, comme nous le verrons par la suite.

Sans faire une énumération exhaustive de ces hommes de pouvoir, il est nécessaire de s'attarder sur certains de leurs caractéristiques, soit à cause de leur importance pour la construction de l'identité vénézuelienne, soit pour leur rôle dans le développement économique du pays, soit enfin pour leur ascension sociale fulgurante grâce à leur rôle militaire.

C'est le cas de José Antonio Páez, qui par sa participation active dans les luttes d'indépendance est nommé Jefe Supremo de las Tropas Revolucionarias en 1819. Fils d'un fonctionnaire métis de l'administration du tabac, péon sans aucune éducation6, il s'autoproclame président du Venezuela en 1829. En 1836, il prend lui-même le commandement de l'armée pour réprimer une révolte au cours de laquelle il massacre les rebelles. José Antonio Páez parvient à avoir une influence politique pendant plus de trois décennies au Venezuela, même s'il partage un temps (entre 1848 et 1858) le pouvoir avec son successeur, José Tadeo Monagas, ancien majordome dans les haciendas vénézuéliennes puis général de division dans l'armée patriote. Soldat, chef de bande, homme autoritaire, Monagas va toujours s'appuyer sur les couches les plus démunies de la population pour conserver le pouvoir, luttant contre l'oligarchie conservatrice7. Cet appui du pouvoir sur les couches les plus populaires caractérise aujourd'hui la politique du président Chávez.

Les dictatures de ces deux hommes sont mises à mal par moment par des guerres civiles comme celle en 1859 qui déchire le pays pendant cinq ans8 et auquel le général Juan Crisóstomo Falcón met fin en 1864. Ministre, président intérimaire et ambassadeur du gouvernement de Falcón, Antonio Guzmán Blanco arrive au pouvoir en 1879 alors que la situation du pays est anarchique. Son exemple est intéressant pour notre propos car il est considéré comme la figure représentative du caudillo, en développant notamment un fort culte de la personnalité. Cet homme est important car il amorce le processus de construction de la mémoire collective et nationale vénézuélienne, en réunissant notamment ses compatriotes autour d'un symbole, le transfert des cendres de Bolívar à Caracas. Symbole qui fait le ciment de la démocratie participative de l'actuel président.

Après le gouvernement du général Cipriano Castro qui se caractérise par la corruption, le gaspillage des ressources de l'État et l'autoritarisme, l'aggravation de problèmes économiques et sociaux et qui provoque la dernière guerre civile du dix-neuvième siècle, il faut s'intéresser à Juan Vicente Gómez.

Outre ses origines modestes de peón en tant que fils d'un espagnol et d'une indienne, et son engagement dans l'armée qui l'apparente à la dynastie des chefs de gouvernement vénézuelien dont Hugo Chávez est le digne successeur, cet homme est important pour avoir fait entrer ce pays dans l'ère de la modernisation grâce à la découverte du pétrole. En effet, cet événement est d'une importance capitale pour le Venezuela qui devient soudain le deuxième producteur mondial de pétrole9. Gómez prend soin alors de régler les dettes du pays10 et d'accorder des concessions pétrolières aux compagnies nord-américaines11 et européennes. Au sein de la société vénézuelienne, cela se traduit par l'enrichissement des hommes politiques, la modernisation accrue de l'armée, et la montée en puissance d'une classe moyenne employée dans l'industrie pétrolière et ses dérivés. Cependant, une majeure partie de la société reste exclue des bénéfices et de la richesse tirée de ce produit. Par ailleurs, le Venezuela existe désormais aux yeux du monde et surtout des Etats-Unis pour lesquels il représente une manne financière. L'ingérence permanente des Etats-Unis dans les affaires politiques intérieures à partir de cette époque et encore aujourd'hui influence l'histoire moderne du Venezuela.

Après la dictature très répressive du général Marcos Pérez Jiménez entre 1948 et 1957, Rómulo Betancourt est le premier président civil du Venezuela élu en 1959. A l'origine avocat, journaliste et membre de l'association d'étudiants du Venezuela, il est un opposant affiché pendant les précédentes dictatures et fondateur du parti Acción Demácrática12. Il consolide les institutions démocratiques malgré l'opposition des militaires conservateurs. Sur un plan économique, Bétancourt paye notamment les dettes de la dictature et évite la fuite massive de capitaux vers l'étranger. Il reconstitue progressivement les réserves de l'État grâce à une politique pétrolière protectionniste, en évitant le gaspillage et en échangeant le pétrole contre des biens d'équipements nécessaires au réel développement socioéconomique du pays. Au niveau social, le président et son parti Acción Democrática se montrent attentifs à la réduction des inégalités. Ce fut cette bienveillance envers les classes populaires qui provoque sa chute puisque en 1964 les secteurs privilégiés de la société font appel à l'armée, afin mettre fin à ce gouvernement trop contraire à leurs intérêts personnels.

Ce contexte démocratique est contemporain du développement de la télévision vénézuelienne. Ceci explique que les grandes chaînes privées des groupes Cisneros et Phelps se sentent aujourd'hui les garantes d'un système politique, qui pour elles, est synonyme de liberté. Cependant, depuis les années 1960, elles ont évolué en entretenant une confusion auprès du public et de l'opinion internationale, entre liberté d'expression, à l'origine de leur création, et liberté d'entreprise.

Avant de s'intéresser à l'avènement de Hugo Chávez sur le devant de la scène politique, le développement de la télévision vénézuelienne dans son contexte socio-économique nous paraît intéressant à expliquer. Ses caractéristiques et son rôle dans la société ont en effet leur importance pour mieux comprendre la fonction et l'importance de l'émission que nous nous proposons d'étudier.

2. Une privatisation extrême de la télévision vénézuelienne au service de la politique

L'histoire du développement de la télévision au Venezuela est préfigurée par la naissance entre 1930 et 1940 de la radiodiffusion qui se développe de façon commerciale sans aucune régulation. En effet, une loi sur les télécommunications votée en 1941 stipule que toutes les fréquences radio et télévision appartiennent à l'Etat, les entrepreneurs opérant sous le régime de la concession. En réalité, les concessionnaires s'approprient progressivement la plupart des fréquences sans que l'état ne perçoive aucune taxe.

La télévision voit le jour dans ce pays vers 1950, avec la création de deux chaînes publiques, Televisora Nacional (TVN5) et Televisa (Canal 4), et d'une chaîne privée, Radio Caracas Televisión du groupe Phelps. Au cours des années 60, Televisa, déficitaire, est rachetée par le groupe Cisneros et devient Venevisión. Ces deux chaînes sont toujours les plus importantes dans ce pays. En 1964, Venezolana Televisión (Canal 8) est créée à l'initiative du groupe de Goar Mestre, qui l'abandonne à cause de problèmes de diffusion et de son départ pour Cuba. Elle est aujourd'hui une chaîne d'état qui diffuse notamment l'émission dont nous proposons l'analyse.

Il faut signaler aussi qu'à l'instar des autres pays sud-américains, les grandes corporations télévisuelles nord-américaines (CBS, NBC, ABC) ont été présentes dès la naissance du système télévisuel vénézuelien par la participation au capital des chaînes, la vente de programmes, et les investissements publicitaires.

Aujourd'hui, le paysage audiovisuel du pays comporte vingt chaînes nationales et locales, ainsi que depuis les années 1990 un réseau câblé et satellite13 permettant l'accès des chaînes américaines notamment. La capitale Caracas abrite les chaînes les plus importantes à couverture nationale: les chaînes privées, Radio Caracas Televisión, Televisión-Canal 2, Venevisión Canal 4, Televen Canal 10, et deux chaînes publiques, Venezolana de Televisión Canal 8 et Vive TV. Précisons que jusqu'à une date récente l'audience des chaînes publiques était très faible (environ 20 %), en raison notamment de la supériorité technique des chaînes privées financées à 70 % par les ressources publicitaires. En effet, un autre caractère marquant de la situation télévisuelle de ce pays est sa saturation en terme de publicité. L'investissement publicitaire dépasse 65% du financement des chaînes. Les deux grandes chaînes privées se partagent cette manne financière, engendrant un profond déséquilibre entre les différents médias, notamment publics.

L'équipement en téléviseurs approche 90 % des foyers vénézueliens. Le médium télévisuel représente le principal loisir des citoyens, notamment dans les classes populaires majoritaires. A l'instar de la situation de plusieurs pays d'Amérique latine comme la Colombie voisine, le rôle de télévision est prépondérant dans l'importation et l'intégration de certains comportements et valeurs nord-américains. La programmation des chaînes se ressent de cette influence avec plus de la moitié d' enlatados, soit des téléfilms et séries policières. Contrairement à la situation télévisuelle européenne, l'importance en terme d'audience des informations télévisées est très faible, due notamment au peu de contenu des journaux et à leur manque d'intérêt, le pays comptant peu de journalistes spécialisés, même si en ce début de XXIe siècle, la situation commence à changer, avec la diffusion des chaînes d'information14. Le prime-time (21 heures à 22heures) est en fait occupé par une telenovela. Chaque chaîne propose en outre deux ou trois talk-shows, magazines fourre-tout abordant faits divers et thèmes brûlants, et quelques programmes comiques et populaires.

Cette particularité du paysage audiovisuel vénézuelien explique sans doute le choix du président pour un talk-show dominical et non des interventions au journal du soir, comme c'est le cas en France et dans la plupart des pays.

Il est impossible de dissocier l'existence et le succès de l'émission Aló Presidente de cette dichotomie historique entre un secteur public quasi inexistant et un secteur privé prépondérant et affilié à certaines sphères du pouvoir politique et économique.

Deux groupes de communication contrôlent le secteur privé, soit la majorité des chaînes, Cisneros et Phelps. Ces groupes industriels et financiers ont très tôt réinvesti les bénéfices liés à l'exploitation pétrolière dans le développement des programmes télévisés, évidemment au Venezuela, mais dans toute l'Amérique latine, aux Etats-Unis et plus récemment en Europe (Espagne, Italie, Russie).

Le groupe Phelps s'est constitué entre 1922 et 1929 et se distingue par un secteur important de son activité destiné à l'import/export et à l'immobilier. Pour le grand public, les Phelps ont une image discrète et aristocratique, provenant du fondateur, William H. Phelps, homme d'affaires d'Amérique du Nord. Ce sont des figures importantes de la vie politique et culturelle de ce pays. Fondateur de Radio Caracas, puis de RCTV (Radio Caracas Télévision), organisateur de manifestations culturelles et créateur de El Diario de Caracas, ce groupe exerce une influence idéologique et politique sur le pays, et demeure proche des classes moyennes intellectuelles et des milieux d'affaires vénézueliens. Avec Coral Pictures, filiale de RCTV, ils sont aussi très présents au niveau télévisuel nord-américain et sur le reste du continent avec Gems TV (Great Entertainment from Monday to Sunday), surnommée la chaîne de l'amour, avec sa diffusion ininterrompue de telenovelas.

Le groupe Cisneros, avec la chaîne Venevisión, occupe la troisième place sur le marché audiovisuel latino-américain, après les géants brésiliens et mexicains Televisa et Globo. Au Venezuela, il est aujourd'hui le groupe le plus puissant. Issu de l'immigration cubaine des années 1940, il doit sa réussite économique à la mise en bouteille de sodas dont il acquiert le monopole, ainsi que la distribution de Pepsi à partir des années 1970. La distribution des produits alimentaires (hypermarchés), le monopole de l'industrie plastique, l'informatique, l'industrie des métaux (aluminium et or) sont autant d'activités de ce groupe qui regroupe aujourd'hui une cinquantaine d'entreprises. En tant que groupe de communication, la famille Cisneros fonde dans les années 1960 Corporación Venezolana de Televisión Venevisión, pour le public - avec la participation de la chaîne de américaine ABC. Le groupe s'est diversifié avec la production de programmes, l'édition audio et vidéo, etc. mais aussi sur le plan radiophonique avec la création en 1969 de Emisora Radio Exitos, enrichie depuis de deux autres radios.

Depuis la fin des années 1990, son expansion aux Etats-Unis est exemplaire avec le rachat en compagnie de Televisa et d'un investisseur américain d' nivisión, un des principaux net-works hispaniques de ce pays. En Europe, leur présence est importante dans la vente de programmes depuis le milieu des années 198015.

En nous étendant volontairement sur le poids économique de ces deux groupes industriels détenant la quasi-totalité des médias16, nous voulons souligner ici combien la question des rapports entre médias et société se pose avec une intensité toute particulière au Venezuela.

Ces médias traditionnels privés, aux mains d'intérêts commerciaux et en lien direct avec l'ancienne oligarchie17, ont en effet depuis longtemps troqué l'objectivité et la déontologie journalistiques pour un militantisme forcené. Ils endossent aujourd'hui le rôle de porte-parole d'une opposition qui refuse d'accepter la légitimité du président Chávez18 . Ils ne reculent en effet devant rien pour influencer la donne politique: censure, manipulation de l'information sont monnaie courante, fait gravissime pour des chaînes télévisées qui font 70% d'audience en moyenne.

Depuis l'élection du président Chavez, des voix se sont élevées contre les privatisations à outrance et pour l'organisation d'une véritable démocratie audiovisuelle. Un comité pour une radiotélévision de service public réunissant des personnalités du monde universitaire et culturel (présidé par Antonio Pasquali19) a été réuni par le gouvernement et travaille dans ce sens.

Par conséquent, l'émission du président s'inscrit dans ce cadre audiovisuel complexe. Contrairement à la situation des télévisions européennes qui ont vu au cours des années 1980 une dérégulation progressive du monopole télévisuel de l'état pour une libéralisation et la création d'un secteur privé, la télévision colombienne fut d'abord privée, sans déontologie professionnelle et avec pour toute règle une logique de profit. L'émission étudiée ci-après renforce ainsi un secteur public encore balbutiant, même si son indépendance vis-à-vis du pouvoir est bien évidemment inexistante.

3. Hugo Chavez : république bolivarienne et démocratie participative

Hugo Chávez Frías est élu président du Venezuela en 1999. Cet homme, d'origine zambo-métisse modeste, commence sa carrière militaire en 1975. Ses convictions nationalistes l'amènent à créer en 1982 le Movimiento Bolivariano Revolucionario 20020, qui en s'appuyant sur la pensée de Bolívar dénonce la corruption et l'incapacité des gouvernements civils au pouvoir depuis la chute de Bétancourt. Alors que le pays traverse une crise économique et sociale sans précédent21, il profite de sa nomination de colonel pour tenter un coup d'État le 3 février 1992 en compagnie d'autres militaires, et mettre fin à trente ans d'hégémonie des partis Acción Democratica et Copei (Démocrate Chrétien). Le président civil Carlos Andrés Pérez, conserve cependant le pouvoir. Mais, l'initiative de Chávez est accueillie favorablement par quatre vingt pourcent d'une population passée en quelques années en dessous du seuil de pauvreté. La popularité de Chávez, emprisonné, ne cesse désormais de croître.

Chávez, libéré en 1993, crée alors un parti politique susceptible «d'anéantir la vieille classe politique», le parti Movimiento V República (MVR), avec l'aide de ses anciens compagnons militaires. Récupérer l'honneur de la nation, gérer efficacement les ressources nationales, en finir avec la corruption et l'insécurité des citoyens sont les bases de ce discours populiste chargé de messages messianiques articulés autour de la patrie et de Bolívar. Lors des élections législatives de 1998, le MVR devient le deuxième parti politique du pays, à côté d'Action Démocratique. Le 6 décembre 1998, Chávez, le candidat du «peuple» et des «humbles» est élu président du pays grâce au soutien de l'armée et des classes populaires. Il annonce alors sa détermination de faire du Venezuela le pays phare du continent. Pour ce faire, grâce au référendum du 25 avril 1999, Chávez modifie en profondeur la Constitution de 1959 et consacre la cinquième République, la República Bolivariana de Venezuela.

Au niveau international, la politique de Chávez s'articule sur plusieurs niveaux, mais reste marquée par un fort anti-américanisme22. D'un côté, il initie une relation privilégiée avec Fidel Castro, en cultivant une image personnelle de «disciple du Commandant de La Havane»23. En octobre 2000, Cuba et le Venezuela signent d'ailleurs un traité de Coopération Intégrale24. D'un autre côté, le Venezuela s'oppose à l'invasion de l'Afghanistan en 2002 et de l'Irak en 2003. Chávez privilégie en tant que président d'un pays pétrolier, les relations avec les États arabes afin de contrebalancer l'hégémonie américaine.

À l'intérieur du pays, l'image de Chávez se détériore car la corruption reste un problème fondamental, de même que la pauvreté. Afin d'éradiquer ces problèmes inhérents à la société vénézuelienne, il promulgue en novembre 2001 des lois sur la pêche, l'agriculture et les hydrocarbures, comme celle sur l'expropriation des grandes hatos25 afin de distribuer ces terres aux moins favorisés. L'autoritarisme du président est largement critiqué à cette occasion, et dès le mois de décembre, commence une grève des Petroleos de Venezuela SA initiée par Fedecámaras26, organisation patronale protestant contre les atteintes au libre marché, et suivie des partis politiques d'opposition, par certains syndicats27 . L'opposition politique se proclame «société civile», au nom des intérêts d'une population qu'elle prétend défendre, et demande la démission de Chávez, qualifié de démagogue, de complice de la corruption, d'opposant à la liberté d'expression et d'initiateur d'une révolution castro-communiste. On dénonce aussi le fait que la politique de Chávez met en danger les investissements privés et provoque la fuite de capitaux, en faisant remarquer l'énorme déficit budgétaire de l'État28.

Le début de l'année 2002 est marqué par une instabilité croissante du pays, les manifestations se multiplient à Caracas suite à l'appel de grève générale illimitée lancé par CTV et Fedecámaras, ainsi qu'à la dissidence de certains généraux de l'armée. Suite aux affrontements meurtriers du 10 avril29, le président Chávez perd le contrôle de l'État. Le 12 avril, Pedro Carmona Estanga, le patron de Fedecámaras, dissout l'assemblée nationale, destitue les gouverneurs et maires issus des urnes, et annonce la formation d'une junte civile et militaire. Mais, ce gouvernement ne reste qu'une journée au pouvoir car les classes populaires occupent les rues et les places dans tout le pays en demandant la libération de Chávez. En reprenant le contrôle des garnisons et du palais présidentiel, certains généraux chavistas rétablissent l'autorité du président le 13 avril 2002. Cependant, malgré une longue grève ruineuse pour l'économie du pays, l'opposition unifiée dans la Coordinadora Democrática remet en décembre 2003 au Consejo Nacional Electoral les signatures nécessaires pour mettre en place un référendum demandant la révocation du mandat de Chávez.

Mais, le 15 août 2004, les Vénézuéliens votent en faveur du président. Il s'agit d'une véritable revanche sociale et politique30.

Le lieutenant-colonel Hugo Chávez Frías nous semble être le symbole d'une tradition vénézuélienne caractérisée par la reconnaissance d'une figure politique particulière: le caudillo31 qui grâce à son charisme et à l'importance accordée au culte de la personnalité, permet aux classes subalternes de s'identifier pleinement à son personnage. Cependant, malgré des parentés avec les exemples castriste et péroniste, le modèle politique de Chávez est différent et ne permet plus le même fonctionnement. Il est en effet associé d'une part au contexte économique actuel lié à la mondialisation, dont le Venezuela en tant que producteur de pétrole est partie prenante, et d'autre part à une utilisation nouvelle des moyens de communication32.

4.«Aló Presidente», programme au service de la politique d'un homme ou alternative démocratique d'un secteur audiovisuel public en devenir?

Fidèle à sa volonté de favoriser l'initiative citoyenne, le gouvernement vénézuélien décida en 2000, de rendre légaux les organes de communication locale (radio et télévision) qui n'étaient jusque là que tolérés ou clandestins. La nouvelle Constitution établit en effet le «droit à la communication» comme l'un des outils de la «démocratie participative»33 qu'elle institutionnalise:

La création culturelle est libre, cette liberté comprend le droit de production, d'investissement et de diffusion des œuvres créatrices, scientifiques, techniques et humanistes, et incluant la protection légale des droits d'auteurs, homme et femme, sur leurs œuvres34.

Emblématique du processus bolivarien, la réflexion menée dans les médias communautaires est donc à la fois l'outil et l'aboutissement du principe de démocratie participative. Quels que soient les principes ou la démagogie sous-jacents, il est important de souligner ici combien ce cadre juridique et légal est devenu nécessaire pour un système télévisuel aussi puissant que la télévision vénézuelienne. Face au libéralisme forcené des pratiques médiatiques privées opérantes dans ce pays depuis la fin de la dictature en 1959, une certaine forme de régulation ne peut être que bénéfique pour la société vénézuelienne. Dans ce sens, nous faisons ici une parenthèse en présentant brièvement la chaîne communautaire publique Vive TV, lancée en novembre 2003, qui est devenue à notre avis le fer de lance d'un certain changement dans les pratiques télévisuelles du Venezuela.

Alors que les deux tiers de la population n'existent pas pour les médias traditionnels privés, en tant que tranche de la population la plus pauvre et donc la moins intéressante pour les annonceurs, le projet de Vive TV est de représenter cette «Communauté des invisibles»35. Selon la présidente de la chaîne, Blanca Eekhout36, aucune condition idéologique ne fut imposée au lancement de ce projet qui visait à «créer une vitrine nationale pour tous les mouvements locaux de communication locale dans le pays».

Quelques mois après sa création, Vive TV émet déjà seize heures par jour. Les programmes diffusés sont des plus variés: culture, éducation, presse, information mais aussi divertissement et humour, et fait des émules37. Vive TV propose en outre une émission d'information sur la production des programmes : une forme de transparence sur le fonctionnement de la chaîne et une éducation sur la construction de l'information.

Ici, contrairement à ce qui se passe ailleurs, le point de vue de la population est mis en avant. Les personnes qui passent à l'écran et discutent des initiatives gouvernementales ou de l'actualité, ne sont ni des membres du gouvernement, ni des hommes politiques, ni des experts. Ce sont des membres des barrios et des communautés indigènes. Ils témoignent de la façon dont ils vivent quotidiennement les réformes en cours. Ils commentent simplement les faits, loin des programmes politiques et loin des idéologies. Ils donnent leur point de vue réaliste du pays. Ils sont donc la voix de cette conscience politique qui, plus que son leader tant controversé, fait avancer le pays.

Souvent plus dure que celle de l'opposition, cette «critique révolutionnaire», qui réclame bien souvent que la Constitution soit appliquée plus vite et mieux, est au bout du compte la garante du processus, la vigie sans laquelle le gouvernement pourrait s'embourber dans une idéologie coupée de la réalité du pays.

Par conséquent, l'un des principaux changements apportés par le gouvernement de Chavez est d'avoir créé un nouveau système télévisuel, comme alternative à celui en place initialement. Ainsi, deux télévisions coexistent au Venezuela, deux visions du monde radicalement opposées, miroir à double face d'une réalité complexe.

Cependant, si Vive TV est bien une chaîne d'Etat avec plus de 150 salariés, elle jouit d'une indépendance à tous les niveaux. A cet égard, elle se distingue de l'autre chaîne de télévision publique, VTV Canal 8, prise dans une logique conflictuelle de riposte à l'opposition, ce qui la condamne à une certaine médiocrité journalistique.

C'est sur cette chaîne d'état qu'est diffusée l'émission Aló Presidente, émission hebdomadaire dominicale. Ce show matinal présente la particularité d'être animée en direct par le Président Chávez lui-même. Plusieurs caractères frappent l'observateur européen, peu habitué à voir les hommes politiques dans un format télévisuel généralement réservé aux célébrités et vedettes du petit écran.

Tout d'abord la durée de ce talk-show, en moyenne entre cinq à sept heures d'émission, est totalement impensable en Europe, surtout pour une émission qui est diffusée en direct. Elle est d'ailleurs parfois annulée pour cause de défaillances techniques lorsque le plateau est installé loin de la capitale38. Cette inscription dans le temps qui permet au président de répondre soigneusement aux questions et de se laisser aller à développer ses convictions et sentiments, est révélatrice à notre avis de la sincérité du personnage dans ces moments télévisuels. En effet, nul, aussi bon communicateur soit-il, ne saurait "jouer" un rôle pendant cinq heures. Ainsi, Chávez s'ouvre au téléspectateur d'une façon réelle, ce qu'aucun chef d'État occidental n'accepterait de faire. Si la réalité sociale et économique rattrape souvent les discours de cet homme, à tel point qu'il est possible de l'accuser de démagogie, cette émission ne l'est en aucun cas. Elle s'apparenterait davantage à la profession de foi d'un prédicateur convaincu que ses idéaux deviendront réalité. On ne peut s'empêcher de faire la comparaison d'ailleurs entre le format télévisuel de cette émission, son déroulement, le choix de son horaire avec les shows télévisuels des prédicateurs nord-américains.

En effet, ces grand-messes sont un moyen nécessaire pour le président pour maintenir un contact direct avec sa majorité. Le contenu de l'émission est ainsi emblématique du désir de transposer dans la réalité et de façon directe un discours politique idéologique. Au cours de cette émission généralement bien rythmée, se succèdent des discussions avec des invités, des inaugurations d'établissements publics (hôpitaux, maternités, écoles), un soutien à certains candidats locaux pour des élections ou des projets. Mais surtout, le président reçoit des appels téléphoniques (d'où le titre) de tout le pays. Cette dimension d'improvisation (les appels sont en direct) donne à Chávez la possibilité de s'exprimer directement avec le peuple. A ce dernier, elle permet de discuter et d'échanger avec le président, mais aussi d'apprendre à le connaître. Incompréhensible vu d'Europe, ce programme n'a rien à voir avec les discours fleuves d'un Fidel Castro. Elle perd tout son sens en dehors de la réalité de la situation du Venezuela.

Il faut insister sur la spontanéité et l'aisance du président-animateur qui est sans aucun doute la base du succès de cette émission, et qui lui permet de faire oublier à sa majorité que les résultats de sa politique se font souvent attendre dans la réalité. Ce contact facile est aussi lié à son physique métissé et à sa gouaille populaire qui le rend proche de son public. A titre d'exemple, il fait s'esclaffer l'assistance au cours d'un programme en se moquant de Fidel Castro qui selon lui chante très mal; une autre semaine, il prend congé d'une modeste téléspectatrice en lui disant tendrement «Hola, mi vida, te mando un beso…»; ou encore il s'adresse d'un ton menaçant à ces détracteurs en conclusion d'une émission par : «Et je donne un conseil à ceux qui veulent me déstabiliser: je sais combien ils sont et combien ils pèsent après le déjeuner!». L'analyse du discours télévisuel de Chávez dans cette émission ne saurait se contenter de ces extraits un peu caricaturaux, mais ils montrent tout de même son caractère spécifique : une émission au cours de laquelle un homme politique n'a pas besoin d'un professionnel médiatique pour jouer les intermédiaires avec son public, un souci de transparence et d'absence de truquage, une personnalité qui ne nie pas ses origines populaires sous un vernis politicien, tous ces éléments concourent au succès de «Aló Presidente».

Si de par le passé les caudillos d'Amérique Latine ont facilement utilisé les médias de masse pour fédérer et diffuser le sentiment national39, l'originalité de cette émission relève d'une autre logique. Comme le souligne J.Martín Barbero,

Le processus que l'Amérique latine vit au début du XXIe siècle est différent: les moyens de communication de masse cooptés par la télévision, sont devenus de puissants agents d'une culture monde dont les expressions les plus explicites résident dans la façon de voir des jeunes et l'apparition de cultures dépourvues de mémoire territoriale […]40

Nous avons vu lors de la présentation des chaînes privées vénézueliennes combien ces dernières appartiennent à ce type de communication et véhiculent cette culture. L'originalité de «Aló Presidente» vient du fait qu'elle court-circuite ce système télévisuel en redonnant espoir et valeurs à une partie de la société qui ne pouvait avoir accès aux modèles véhiculés par les autres chaînes, ce qui explique son succès. Nous pensons également que le soutien de ce peuple à son président comme les événements récents l'ont montré, n'est pas étranger à cette utilisation que fait Chávez du médium télévisuel dans son ensemble, en faisant des aller et retour permanents entre une forme de propagande et une certaine interactivité démocratique. Cette utilisation médiatique propose une illustration moderne de la figure traditionnelle du caudillo.

BIBLIOGRAPHIE

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  • Demélas Danielle; Saint-Geours Yves, La vie quotidienne en Amérique du Sud au temps de Bolívar 1809-1830, Paris, éd. Hachette, 1987.
     
  • Guillén Martínez Fernando, El poder político en Colombia, Bogotá, éd. Planeta, 1996.
     
  • Langue Frédérique, Histoire du Venezuela de la conquête à nos jours, Paris, éd. L'Harmattan, 1999. Et Hugo Chávez et le Venezuela, une action politique au pays de Bolivar, Paris : l'Harmattan, 2002.
     
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  • Rapport de la Fondation CIBOD, La Venezuela de Hugo Chávez 2000-2002, Barcelona, 2002.
     
  • Schneider-Madanes Graciela, L'Amérique latine et ses télévisions, du local au mondial, coll.anthropos, Inra vision, Bogotá, 1995.

NOTES

  1. Nom du Venezuela pendant la période coloniale.
  2. Des habitants des plaines issus de mélanges phénotypiques entre les Indiens, les mulâtres, les métisses et les Noirs.
  3. Zambo : mélange phénotypique entre un Indien et un Noir. Mulato: mélange phénotypique entre un Indien et un Blanc.
  4. Dans l'ensemble du continent, les autorités légitimes ont été renversées par des révoltes aristocratiques dans les capitales de l'empire: Quito en 1809, Santa Fe et Caracas en 1810.
  5. Guillén Martínez souligne le fait que pendant la guerre d'Indépendance, l'armée vénézuélienne a été une force démocratique et un canal de mobilité sociale ascendante jamais connu auparavant au Venezuela. Il considère que l'armée a été «la primera y la única de las asociaciones integradoras de su población», Guillén Martínez, Fernando, El poder político en Colombia, Bogotá, Planeta, 1996, p.270.
  6. Demélas, Danielle ; Saint-Geours, Yves, La vie quotidienne en Amérique du Sud au temps de Bolívar, 1809-1830, Paris, Hachette, 1987, p.197.
  7. En 1848, la loi de Baldíos met à disposition des anciens combattants des guerres d'Indépendance et de leurs proches parents, des parcelles de terre destinées à l'agriculture. Monagas, sa famille et ses proches acquièrent ainsi 41% de terres baldías du Venezuela
  8. La guerre affecte considérablement l'élite créole : les grands propriétaires terriens et les commerçants. «L'aristocratie vénézuélienne ne se releva jamais des pertes sanglantes qu'elle subit à cette époque», Ulric, Jean, Le Venezuela, Paris, Seuil, 1966, p.52.
  9. Il est aujourd'hui le 7 e pays exportateur mondial de pétrole brut.
  10. En 1930 Gómez a pu rembourser l'intégralité de la dette extérieure du pays.
  11. Principalement la compagnie Shell qui exploite le premier puits de pétrole près de Maracaibo.
  12. Parti fondé en 1941 sur des principes nationalistes et anti-oligarchiques.
  13. Omnivisión et Cablevisión sont les deux réseaux les plus importants.
  14. Globovisión et Promar TV sont deux chaînes exclusivement informatives. La première diffuse 24 heures d'information, est critiquée par les vénézueliens eux-mêmes qui la surnomment «Globoterror», par son traitement alarmiste de l'information. La seconde s'apparente à CNN, dont elle est l'équivalent au Venezuela.
  15. L'importance de la production de programmes pour l'Europe avec la telenovela « Loba Herida » par exemple n'est pas à négliger avec plus de 600 heures de programmes vendus, contre 10400 en Amérique latine (Chili et Argentine, surtout), et 400 heures aux Etats-Unis.
  16. C'est-à-dire neuf des dix quotidiens nationaux et six des sept grandes chaînes de télévision.
  17. Il faut savoir que le groupe Cisneros a appuyé longtemps la gestion du parti d'Action Démocratique, et du président Carlos Andrès Perez, dont il a financé la dernière campagne électorale.
  18. L'exemple le plus récent est l'insistance avec laquelle ils se sont faits les mandataires de l'opposition en criant à la fraude lors du référendum d'Août 2004, alors que les observateurs étrangers, même américains, avaient déclaré la viabilité du scrutin.
  19. Antonio Pasquali est un chercheur en communication reconnu dans toute l'Amérique latine et ailleurs, il professeur à l'université de Caracas et est connu pour ses nombreux ouvrages sur les médias et la mondialisation, parus dès la fin des années 1960.
  20. MBR-200 voulant faire allusion au bicentenaire de la naissance de Simón Bolívar.
  21. En 1989 le Venezuela de Carlos Andrés Pérez doit faire face à une grave crise socio-économique, le Caracazo . La politique néolibérale du président et la mise en place d'un plan draconien exigé par le FMI provoquent la hausse des prix des services et des biens de première nécessité. Les vénézueliens prennent alors d'assaut tous les commerces. Voir Frédérique Langue, op. cit., p.341.
  22. Le rôle des politiciens américains dans leur soutien à l'opposition politique de Chávez lors de la crise d'avril 2002 montre combien ces derniers étaient inquiets de perdre le contrôle du pétrole vénézuelien dont les américains dépendent.
  23. Chávez présente Castro comme «un campéon de libertades», et Castro quant à lui n'hésite pas à qualifier Chávez de «el mayor demócrata de América», rapport de la Fondation CIBOD, La Venezuela de Hugo Chávez 2000-2002, Barcelona,.2002,
  24. Cet accord prévoit que le Venezuela fournira Cuba en pétrole (50.000 barils par jour en échange de services techniques et de professionnels cubains, surtout des médecins)
  25. Ce mot désigne au Venezuela et à Cuba une propriété dans laquelle est élevée le bétail.
  26. Le principal opposant de Chavez était le président de Fedecámaras, Pedro Carmona Estanga.
  27. Notamment la CTV, confédération des travailleurs du Venezuela, affiliée à Action Démocratique et dirigée par le social démocrate Carlos Ortega.
  28. Celui-ci avoisine les 10% du PIB, soit près de 9.000 millions de dollars, même si ce dernier, dans un pays où 50% des revenus de l'état sont issus du pétrole, a pour cause la chute du prix du baril, à la suite du 11 septembre.
  29. Les affrontements lors de la marche des opposants de Chávez vers le palais présidentiel, entre les membres de la Garde Nationale avec les franc-tireurs partisans de Chávez, et les opposants appuyés par la Police Métropolitaine, se soldent par la mort de quinze personnes et plus de trois cent blessés.
  30. Lire à ce propos l'article de Marie Delcas, « Conciliation ou affrontement au Venezuela», in Le Monde, 23 septembre 2004.
  31. «Devant l'impossibilité de recourir à des définitions classiques pour expliquer le chavisme, de nouvelles notions sont nécessaires. Chávez, comme d'autres militaires socialisants du continent latino-américain, pratique ce que le politicien Ramón Velázquez appelle le «caudillisme» charismatique, version vernaculaire et caribéenne du bonapartisme, pouvoir au service non pas des masses mais du dirigeant lui-même», in Bernard, Carmen, «Hugo Chávez et le Venezuela. Une action politique au pays de Bolívar», in Revue Études Rurales, url, Paris, 2003, pp. 165-166.
  32. Ces formes de communication sont différentes de la propagande classique.
  33. "Tous les citoyens et les citoyennes ont le droit de participer librement dans les affaires publiques, directement ou par l'intermédiaire de leurs représentant(e)s élu(e)s. La participation du peuple dans la formation, l'exécution et le contrôle de la gestion des affaires publiques est un moyen nécessaire pour atteindre le processus garantissant un complet développement, tant individuel que collectif. C'est une obligation de L'État et un devoir de la société de faciliter l'émergence des conditions les plus favorables pour sa pratique." Article 62 de la Constitution de la République Bolivarienne du Venezuela.
  34. Article 98 de la Constitution de la République Bolivarienne du Venezuela.
  35. La proximité de la chaîne avec son public est le seul moyen véritable de donner la parole aux victimes de l'exclusion des grands médias privés : les noirs, les indigènes, les métisses.
  36. Blanca Eekhout fut contactée par le gouvernement Chávez alors qu'elle était encore responsable de Catia TV, une chaîne de quartier émettant dans les quartiers ouest de Caracas qui fut fermée en juin 2003 par un maire d'opposition (le seul cas avéré de censure au Venezuela depuis l'arrivée de Chávez au pouvoir).
  37. Il existe désormais une dizaine de chaînes communautaires en activité ou en création dans le pays.
  38. Ce fut le cas de l'émission du 4 septembre 2004.
  39. Nous faisons référence ici aux années 1930-50 où le populisme de Getulio Vargas au Brésil, de Lazaro Cárdenas au Mexique, ou encore Juan Peron en Argentine avait besoin des médias de masse pour communiquer.
  40. Martín Barbero, Jesús, «Politique, télévision et nouveaux modes de représentation en Amérique latine», in Problèmes d'Amérique latine, sous la direction de Daniel Pécault, Paris, éd. Documentation Française, N°43, oct-déc.2001, p.5.